Johanna et Klara Söderberg nous présentent leur quatrième album « Ruins », composé et enregistré sur la côte Ouest des Etats-Unis, en compagnie d’un fameux producteur et des musiciens de R.E.M., Midlake et Wilco.
Après les paillettes et les grandes déclarations de leurs trois précédents albums, les soeurs suédoises, s’émancipent de leur odyssée glamour pour tenter une aventure plus intime mais aussi plus dramatique, racontant une séparation difficile vécue par Klara. Avant de les retrouver le 5 mars prochain à la Cigale, elles nous ont confié les secrets de leur enregistrement sur les terres froides de l’Oregon en compagnie du producteur Tucker Martine (qui a bossé avec entre autres R.E.M., Sufjan Stevens, Grandaddy…)
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Comment est né l’album Ruins ? Il semble faire écho à une rupture personnelle assez dure ?
Klara : Oui, on a imaginé l’album comme un “rock’n’around” autour des ruines d’une relation. Et chaque chanson est une pièce différente. Je l’ai écrit à un moment où je traversais une séparation. C’était très personnel pour moi.
Johanna : A l’époque, Klara habitait en Angleterre et moi en Suède. Klara avait pas mal d’idées, qu’elle a commencé à écrire à Manchester, juste après sa rupture. On a pris tout ça, et on a fini les chansons à Los Angeles. On y a loué une voiture et une maison, et on a composé les chansons, posées sur la terrasse.
Ensuite, vous êtes parties dans l’Oregon, à Portland, pour enregistrer dans le studio de Tucker Martin, n’est-ce-pas ?
Johanna : Oui, c’était en hiver, pendant une tempête de neige. Ca nous rappelait la Suède, c’était magnifique. On a eu le temps d’aller voir des cascades, réputées dans la région et c’est à peu près la seule sortie qu’on ait faite. Le studio était dans une zone industrielle, mais à l’intérieur, tout était en bois, très cosy, avec des bougies.
Klara : On y a passé 6 semaines. Et presque tous les jours, on bossait. On vivait dans le studio (rires) : 14 heures par jour à jouer de la musique.
A l’écoute, on sent que vous avez bousculé vos habitudes, n’est-ce pas ?
Johanna : Oui, on a enregistré presque tout en live. Et on avait un groupe qui jouait avec nous, donc pour chaque chanson, il fallait la jouer presque 20 fois.
Klara : J’ai joué de la guitare électrique pour la première fois, c’était un grand changement. Et on voulait aussi plus de cuivres. Johanna : Notre album précédent avait beaucoup de cordes, c’est très beau. Mais on voulait quelque chose d’autre, un truc plus “raw”, plus brut. Et on pensait que les cuivres suivaient plus cette idée là.
Jusqu’à présent vous travailliez surtout avec le producteur Mike Mogis. D’où est venu l’idée de bosser avec Tucker Martine ?
Johanna : C’est venu de nous ce choix. On adore Mike Mogis, mais on voulait tester quelque chose de nouveau. Tucker, on le connait depuis un moment, depuis notre premier album. Et on adore ce qu’il a fait pour My Morning Jacket, The Decemberists et pour sa femme Laura Veils.
Pour vous accompagner, vous avez eu droit à des pointures comme Peter Buck de REM. Et côté batterie, Glenn Kotche de Wilco et McKenzie Smith de Midlake…
Klara : Oui, Peter a joué de la mandoline et de la guitare à 12 cordes sur pas mal de chansons. C’est un ami de Tucker et il habite dans le coin. Johanna : Glenn a joué la batterie pendant les deux premières semaines. Et ensuite McKenzie a pris le relais, donc ils ont fait la moitié chacun, avec leur propre style. Kotche est probablement un des meilleurs batteurs du monde. Ils étaient aussi des amis du producteur, Tucker a décidément beaucoup d’amis (rires).
Comment s’est passé l’enregistrement avec toute cette bande de musiciens ?
Johanna : On a passé beaucoup de temps ensemble. Surtout quand on fait un album assez sérieux et triste, on avait intérêt à équilibrer cela, et se marrer un peu. Et c’est ce qu’on a fait, on s’est bien amusé entre les prises.
Sur le titre Hem of Her Dress, on entend une chorale, c’est vous tous ?
Johanna : En fait, c’est notre mère, notre petit frère, et la femme de Tucker : Laura Veils. Y’avait aussi mon copain qui chantait dessus, et tous les garçons du groupe. On peut te montrer la vidéo qu’on a fait qui est fun !
Klara était le maître d’orchestre. Elle était très enthousiaste. C’était en janvier… Voyons voir [Johanna, hilare, me montre la vidéo sur son iPhone].
Avec ce disque, on a vraiment l’impression que vous essayez de briser la glace avec une image un peu parfaite, glamour, et tenter de revenir à quelque chose de plus authentique, n’est-ce pas ?
Johanna : En effet. Pas mal de gens nous ont dit : on adore quand vous jouez “live” mais vos albums sont trop parfaits, c’est trop poli et élégant. On voulait donc se débarrasser de ce filtre et d’une certaine manière être plus près de nos fans et de ceux qui nous écoutent. Par exemple sur Hem of her dress, Klara crie et ce n’est pas purement beau, mais j’adore cette énergie. C’est osé, et on ressent plus les paroles de cette façon. Et je crois qu’on peut facilement comprendre qu’on a enregistré en live.
C’est vrai que l’enregistrement live donne un certain naturel à l’album, comme si les paroles étaient improvisées par moment. Sur Postcard, par exemple Klara s’écrie « Pick for me, James » c’est une private joke ?
Johanna : Sur certains titres comme Nothing else to be true, c’est la première fois qu’on ne chantait pas des harmonies. Je chantais puis Klara me répondait. C’est tout nouveau, et c’est important de chanter des parties en solo.
Klara : Et pour Postcard, c’est un clin d’oeil à Gram Parson qu’on adore. Il a un guitariste qui s’appelle James Burton et qui joue sur ses albums (et aussi pour Elvis Presley). Dans une chanson, il dit “pick for me James”… Bon, nous on a personne qui s’appelle James dans le groupe (rires) et il s’agit d’un piano solo, donc tu peux pas “gratter” (to pick, en anglais) mais on trouvait ça marrant de le glisser dans la chanson.
La fin de l’album, Nothing has to be true, est très noisy et brutale, à mille lieux de vos harmonies habituelles. Pourquoi ?
Johanna : Je crois que quand le bruit s’arrête à la toute fin, c’est comme si on se réveillait. La partie instrumentale, c’est comme une transe. Comme tu dis c’est très rude, et c’est ce qu’on voulait sur cet album. Comme c’est assez douloureux, on voulait qu’on puisse palper cette douleur. Et pas en faire un produit trop lisse, avec de belle harmonies. Ça peut paraître étrange, c’est un peu violent oui. La fin, est une sorte de révélateur.
Album Ruins (Columbia, Sony). Disponible sur Apple Music. En concert le 5 mars à la Cigale à Paris.
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