Le chant de Lecocq. Prêtresse du répertoire contemporain, Dominique My donne un coup de plumeau aux vieux couplets d’antan. L’opérette, c’est comme l’accordéon : a priori, ce n’est pas plus ringard qu’autre chose si on ne force pas le trait. On a malheureusement sauté à pieds joints dans la mare aux canards et l’enfant naturelle […]
Le chant de Lecocq. Prêtresse du répertoire contemporain, Dominique My donne un coup de plumeau aux vieux couplets d’antan.
L’opérette, c’est comme l’accordéon : a priori, ce n’est pas plus ringard qu’autre chose si on ne force pas le trait. On a malheureusement sauté à pieds joints dans la mare aux canards et l’enfant naturelle élevée par Offenbach est devenue infréquentable. Difficile de ne pas balancer aux orties les vieux disques des années 60 dont le seul mérite était de déclencher le fou rire au premier refrain. Et pourtant, l’opérette est bien un pan incontournable de notre patrimoine musical. On n’a pas chanté pour rien La Leçon de solfège du Petit duc de Charles Lecocq sur les bancs du collège.
Lecocq, dont le nom fleure bon les atmosphères de sous-préfecture de la IIIème République, est le digne successeur d’Offenbach. Quand il écrit La Fille de Madame Angot en 1872, la France sort de la Commune. Si on chante pour oublier, l’esprit n’est plus à la franche rigolade, même si la satire n’a rien perdu de sa superbe. Bien au contraire. La fameuse chanson Jadis les rois… n’est pas innocente à l’époque d’Adolphe Thiers. Quant aux personnages féminins, ils sont loin d’être décoratifs. Dans son propos, l’ouvrage de Lecocq est plus qu’un divertissement. Il partage les finesses et le savoir-faire de l’opéra-comique.
Dominique My, qui défend avec son Ensemble Fa les partitions contemporaines les plus pointues, était tellement convaincue de son actualité qu’elle s’est lancée avec délectation dans l’aventure : « L’oeuvre n’est pas datée. Il n’y a pas de longueurs. Les airs sont à chaque fois très différents. La spontanéité stimule la précision musicale. Notre but était d’installer un rythme, de donner une lecture moderne en nous basant sur la dramaturgie du texte. Stéphane Verrue a fait un gros travail sur le langage de l’époque. »
Avec vingt-sept musiciens, My et Fa font un boulot d’utilité publique. Si les ingrédients traditionnels (ballets, choeurs…) demeurent, certaines introductions musicales déplacées volent en éclats. Surtout, le spectacle est porté par des chanteurs qui rejettent les réflexes surannés de l’opérette. L’ensemble vocal est composé d’amateurs de la région Nord-Pas-de-Calais qui s’engagent sans compter. Après une rafraîchissante Cenerentola de Rossini, l’Association La Clé des Chants renoue avec un travail d’atelier lucratif. Pour Dominique My, le projet signifie aussi un retour aux sources. Elle qui s’est envoyé durant sa jeunesse toutes les pièces du répertoire au Théâtre de Douai avait délaissé au fil des ans les terres du beau chant. Elle y revient maintenant régulièrement et montre ici que Charles Lecocq mérite le détour.
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Charles Lecocq, La Fille de Madame Angot, mise en scène Stéphane Verrue, Ensemble Fa, direction Dominique My
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