Frisson organique : Agnès Gayraud et le génie pop sont félins pour l’autre.
D’abord un aveu pas évident. Lors d’une première écoute de Senga, single excellent qui ouvre Triomphe, on a dans un furtif moment d’égarement songé à Zazie. Affreux contresens car La Féline est au tout-venant de la variété ce qu’Animal Collective est à la pop manufacturée. Soit un ré-investissement sauvage, fourmillant, instinctif parfois – animal, oui.
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Et particulièrement sur ce nouvel album entre pattes de velours et griffes dehors qui, après un Adieu l’enfance plus détaché et synthétique, déploie des couleurs chaudes et un pelage dense. Agnès Gayraud, récemment entendue sur l’un des sommets du Toi non plus de Maud Lübeck, rejoint comme Fishbach la famille des ensorceleuses qui jouent des tours étourdissants à la pop hexagonale. Et c’est plus au Bowie de Blackstar (le sax du superbe Royaume) qu’à ses compatriotes passés que Triomphe se mesure. Le finale du très poétique La Femme du kiosque sur l’eau et d’autres ascensions tourbillonnantes nous emmènent loin du monde matériel, quand Comité rouge nous parle du présent en intérieur Nuit debout avec un talent littéraire renversant (“des filles fument en ignorant les chefs”). La Féline passe alors du “ils” au “nous” et on accepte volontiers qu’ainsi elle nous enrôle.
Pour définir sa patte, la théoricienne qu’est Agnès Gayraud ne nous en voudra pas de parler de chanson bicamérale. Ses mélodies élégantes sont nourries par des forces occultes, les loups rôdent et les dieux s’amusent à travers les basses, les chœurs chthoniens et les incantations païennes. La touche de légèreté des claviers parachève cet emballant banquet et on veut suivre La Féline sur sa route triomphale. L’avenir de la pop en ligne de fuite et, très loin derrière, Zazie dans le rétro.
concerts le 4 février à Bordeaux (+ The Pirouettes), le 9 à Rouen (+ Paradis), le 16 mars à Paris (Maroquinerie, + Louis-Jean Cormier) et le 2 avril à Nantes
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