Elevée au Sri Lanka, l’Anglaise et très politisée M.I.A. dégaine un deuxième album qui repousse encore les limites des musiques urbaines.
Dans l’histoire de la musique pop des années 2000, il y a fort à parier qu’il y aura un avant et un après Arular. Sorti en 2005, ce premier album politique, guerrier et altermondialiste de M.I.A., toute jeune Anglaise d’origine sri-lankaise, dépassait de quelques coudées franches tous ses contemporains en termes de créativité, d’inventivité, d’énergie, d’ouverture sur le monde.
A l’image de Galang, single ahurissant au refrain belliqueux construit sur un mur de claps, de basses synthétiques crades et de tablas indiens, la musique de M.I.A. n’entrait dans aucune catégorie et semblait même posséder la faculté d’exploser toutes celles existantes.
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Au-delà de sa nouveauté rythmique et formelle, Arular bouleversait aussi par sa portée politique et humaine. Dans le monde bipolarisé du 11 Septembre, il apparaît comme le précieux porteur d’une vision différente et salvatrice ; comme le porte-parole de peuples invisibles, de leurs mouvements de résistance, comme le récit d’une histoire chaotique et bouleversante. Dans ce disque, baptisé d’après le nom révolutionnaire de son père (Arular), M.I.A. avait mis sa vie et son histoire. A l’époque où sort Galang, Diplo (de son vrai nom Wesley Pentz) est l’un des seuls à avoir commencé à explorer (avec sa compilation Favela on Blast, 2004) un pan alors méconnu de la culture brésilienne, le baile funk, cette musique des ghettos qu’il incorpore dans son hip-hop mutant. On retrouve Diplo et son duo Hollertronix sur trois titres de Kala, l’explosif deuxième album de M.I.A. Timbaland apparaît également sur un des titres, Come around, un hip-hop languide et sexy qui ressemble à Promiscuous (duo de Timbaland et Nelly Furtado), en encore plus hot et spicy.
Mais M.I.A. ne s’est pas contentée de fréquenter des pointures de la production hip-hop. L’inspiration de ce second album, qui porte cette fois le surnom révolutionnaire de sa mère (on ne se refait pas), elle est allée la chercher chez les enfants du Liberia, les musiciens aborigènes d’Australie, des orchestres indiens, un MC africain, tous invités sur son album. Beaucoup friseraient le ridicule. Elle en ressort grandie, victorieuse, triomphante. Dès l’halluciné Bamboo Banga, morceau de house vrillée qui cite Roadrunner de Jonathan Richman, on est emporté dans une course folle, une explosion rythmique de tous les instants, qui ne laisse guère reprendre son souffle. Survivre à l’enchaînement de Bamboo Banga, Birdflu, Boyz et Jimmy (un croisement dément entre la musique raï, Abba et The Knife), les quatre monstrueux premiers titres de l’album, s’annonce d’ores et déjà comme un des défis de cette rentrée. M.I.A reste ce miracle, une des rares musiciennes aujourd’hui à pouvoir réaliser avec grâce ce grand écart entre Beverly Hills et le Liberia, entre pop mainstream et musiques minoritaires, farouchement underground.
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