Le jeune rappeur français délivre un nouvel album tortueux et foncedé.
Difficile de comparer Jorrdee à qui que ce soit. Peu de doutes sont permis : en se plongeant dans Avant, le nouveau projet du jeune homme de 24 ans, les repères risquent de s’effacer un à un, immergés sous une cascade d’AutoTune, une voix lente, nasillarde, et des beats distordus, écrasants. Cette impression se confirme dès le début de l’album. Avec le titre d’ouverture, Mamen, le rappeur (faut-il seulement le définir ainsi ?) balance une ballade défoncée, suintant la drogue et la tristesse, soutenue par une simple guitare et un rythme simpliste, avant d’achever l’auditeur dès le deuxième morceau. Arrête est proche de la chanson pop parfaite, avec son refrain fragile et ses paroles d’une opacité peu commune chez Jorrdee : “J’te laisse prendre le volant/Si souvent je perds la maîtrise/Si souvent j’fais le mec libre/Alors que j’cours après le papier volant.”
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Une grande partie du disque traite des thèmes effleurés dans ces quatre phrases toutes simples. Amour, drogue, quête de succès (et désillusion face à ce dernier), introspection sont ici évoqués, comme les mantras autour desquels semble finalement tourner toute une génération de musiciens. Sauf que Jorrdee est certainement un des artistes français les plus doués de son temps, capable de passer de morceaux rageurs (Roulez jeunesse) à des titres carrément lacrymaux (Sans ton sac), puis suffocants, presque irrespirables (+/-, PPTT).
Le tout en ne cessant d’expérimenter, et en réussissant le tour de force de mêler des sons inédits et une sincérité parfois bouleversante. Ce qui fait d’Avant un disque important ; symptomatique d’une génération de mecs et de filles qui s’échappent des cases et brisent d’un poing numérisé, amoureux et désenchanté tous les codes qui ont été établis avant eux.
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