L’étrange Américain publie un album mi-boisé, mi-électronique étonnant, beau et passionnant. Critique et écoute.
La pochette de Pale Green Ghosts n’est certes pas un trompe-l’oeil. Elle est peut-être, en revanche, une fausse promesse : John Grant, le regard dur de yankee indomptable, la barbe taillée au poil, tiré à quatre épingles, trône, raide comme la justice, dans un café tout en boiseries vernies et patines anciennes.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Celui qui n’a pas été prévenu de la nature ambivalente de l’ex-Czars pouvait, avec ce deuxième album solo, attendre une suite logique au précédent Queen of Denmark, enregistré avec ses copains et sauveurs Midlake : orchestrations 70’s, songwriting classique, folk-rock plutôt naturaliste, chansons taillées dans les bois nobles d’immémoriales forêts américaines.
Mais Grant, à l’époque déjà, avait prévenu : il voulait de l’électronique, de la synth-pop, des années 80, citait Kraftwerk, Gary Numan, Visage, a-ha ou, plus récemment, Mock & Toof ou Trentemøller comme des guides à venir. La rencontre avec l’Islande et – surtout – avec Biggi de GusGus a libéré ses désirs : Pale Green Ghosts n’est clairement pas une suite de son Queen of Denmark mais l’entrée du garçon dans des territoires aussi mouvants qu’indéfinis, naviguant sans boussole entre le synthétisme de carte-mère et la plume folk et amère d’un garçon ayant traversé l’enfer, entre beats raides, électronique tordue et arrangements de cordes, magnifiques, piqués aux nuages.
Pale Green Ghosts n’est pas vraiment un disque drôle mais c’est un drôle de disque. Comment cette voix si belle, impérieuse, chaude et profonde arrive-t-elle à se marier avec une telle grâce à l’électronique du fascinant morceau-titre, à celle de Black Belt, à celle de la très dance Sensitive New Age Guy, à celle, belle, tragique, fantomatique, de Why Don’t You Love Me Anymore? Comment peut-on poser un cinglant “Je suis le plus grand enfoiré que tu auras jamais rencontré” avec un tel satiné sur la plus classique GMF ? Où, finalement, John Grant veut-il nous amener ? Quelque part entre épineux des sous-bois et dancefloors en velours, il veut mener vers l’admiration – c’est réussi.
{"type":"Banniere-Basse"}