On retrouve la belle et envoûtante Américaine Joanna Newsom, sans doute l’une des songwriter les plus exigeantes de sa génération, avec un plantureux triple album : les trois marches du podium en fin d’année ?
[attachment id=298]Jadis, à l’époque de son premier album (The Milk Eyed-Mender, 2004), Joanna Newsom était une chanteuse brillamment énervante. Ses chansons enchantaient, mais sa voix caprine tournait souvent au maniérisme couinant. Déjà un peu fée, la Californienne était encore sorcière, le charme revêche, aussi bonne harpiste que petite harpie.
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Le premier morceau du troisième disque de Have One on Me (car c’est un triple album) s’appelle Soft as Chalk, “doux comme la craie”. Et c’est un bon résumé du chemin parcouru par Joanna Newsom : du crissement à la douceur. Les dix-huit chansons de Have One on Me, elle les a écrites en caractères déliés, sur un tableau noir parsemé de mille étoiles.
Par commodité, on rattache Joanna Newsom au folk. Les bonnes fées Karen Dalton, Judee Sill, Carole King ou Kate Bush se sont penchées sur son berceau, au fond de la forêt enchantée. Mais Joanna Newsom n’est pas une descendante. Plutôt une ascendante. Sur Ys, son deuxième album, elle avait décollé. Ici, la femme-papillon flotte et avance en orbite. Son folk ne touche plus terre, il a oublié la pesanteur, l’horloge, la matière et les angles. Il n’est plus que courbes, ondulations, ampleur, éther et légèreté.
Souvent, l’orchestration est minimaliste : des arpèges scintillants de harpe et de kora, du piano, quelques cuivres liquéfiés, flûtiaux et percussions, les volutes effilées d’une voix suave et sensuelle. Les photos intérieures du triple album le prouvent : Joanna Newsom est (devenue) érotique, maîtresse de chansons purement charnelles, émotionnelles, languides. Styles musicaux, étiquettes, références, passez votre chemin, ou restez copiés-collés aux lourdes chausses d’Emilie Simon : Joanna Newsom est ailleurs, elle effeuille ses chansons pour séduire le silence, le meilleur ami-amant de cette musique.
Commencer à écouter ce disque tantrique, c’est prendre le risque de l’écouter en entier, puis en boucle, d’abord habillé, puis tout nu. Long et bon, Have One on Me plonge l’auditeur enjôlé dans une douce et durable hébétude. Disque de l’année, plutôt trois fois qu’une.
Album : Have One On Me (Drag City/PIAS)
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