Les Kaviar Special viendront présenter leur deuxième album, #2, une merveille de garage-psyché aux accents heavy, au Point Éphémère ce samedi 7 mai, avec leurs copains de Volage. L’occasion de découvrir qui se cache derrière ce nom improbable.
A la veille d’un premier concert au Melody Maker, le bar rennais où tout se passe, les quatre garçons n’avaient pas de nom. Ils en trouvèrent un à la va-vite, en se marrant, comme souvent. Ça sera Kaviar Special, et tant pis s’ils ne peuvent pas l’expliquer en interview. « Ça n’a aucun sens« , nous confirment Léo et Adrien, deux membres du groupe que l’on retrouve un lundi après-midi dans un café près de Bastille. Sauf celui d’évoquer quelque chose de précieux mais de sérieusement dézingué.
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L’histoire résume le groupe, né au détour d’une « sortie forêt » organisée par la fac de bio. Adrien et Léo préfèrent se marrer et parler musique que disserter sur leurs prochaines dissections. L’un reprend des classiques avec un pote, Jeremie. L’autre se remet tout juste à la guitare, apprise de façon scolaire et donc laborieuse durant l’adolescence. Tous deux aiment les Strokes, les Libertines et les Black Lips. Pourquoi pas monter un groupe et faire des concerts dans des bars ? Banco. Vincent, chanteur et guitariste, viendra compléter la fine équipe.
« Si t’aimes être dans le vif, t’écoutes du garage »
Tant qu’à faire les choses, autant les faire à fond. La bande vit un an en colloc’ dans une maison dotée d’un garage. « On n’a jamais aussi peu répété de notre vie, se souvient Léo, chanteur et guitariste honnête au visage encadré de rouflaquettes. Parce qu’on faisait la fête. Et c’était compliqué de gérer les voisins, et la gueule de bois. » Ils migrent dans une ancienne porcherie, où répètent les groupes amis Baston, Madcaps, et Sudden Death of Stars, et sortent un premier album très remarqué et remarquable en décembre 2013. Lorsqu’ils s’en font virer un an plus tard, tous ces groupes décident de mutualiser leurs forces (et leurs porte-monnaies) pour louer une longère, dans la banlieue rennaise.
C’est là, entourés de palettes de bois assurant une insonorisation DIY, que les Kaviar mettent sur pied leur deuxième album, le réjouissant #2, sorti début avril. Douze titres clairement influencés par le garage-psyché américain et particulièrement californien, par Ty Segall, Thee Oh Sees, Black Lips, Fresh and Onlys, Bare Wires, Meatbodies, pour ne citer qu’eux. Ces groupes ayant bercé une jeunesse de bandes, galvanisée par l’énergie brute du rock, loin de l’édulcoration et du formatage de la pop. « Si t’aimes faire la fête, être dans le vif, t’écoutes du garage, estime Léo, parce qu’il y a une énergie adolescente. » Adrien, bassiste à la gueule d’ange, ajoute:
« En écoutant du garage, on s’est rendu compte qu’on pouvait jouer, faire la fête, sortir un album. C’est ça le garage, je pense. Avoir confiance en ce que tu fais. Te dire que tu ne vas pas rester dans ton local pourri, que tu peux toi aussi sortir un disque, aller jouer ailleurs que dans ta ville. »
« On ne rapportera pas d’argent »
Le garage est brandi comme un mode de vie, une façon physique d’appréhender la musique. « C’est un état d’esprit, DIY dans tout. C’est une base rock mais avec quelque chose de vénère » explique Adrien. C’est aussi une garantie de s’éclater en concerts. Les groupes estampillés « garage » tournent beaucoup, comme si leurs albums ne trouvaient d’existence véritable, de validation que joués en live, fort et sans fioritures, devant un public souvent acquis à la cause. « Quand un mec comme Ty Segall sort autant d’albums et de EP par an, c’est aussi parce qu’il est dans une frénésie de concerts, parce qu’il aime aller vite, jouer en live, sinon il peaufinerait un seul album sur une plus longue période… » estime Adrien.
Comme leur grand frère californien – qui multiplie les collaborations et formations – les Kaviar ont une vision détendue du groupe. Leur guitariste Vincent s’est longtemps partagé avec les Madcaps, obligeant les deux formations à faire tournée commune, dans un van pourri, avec pour seule garantie de revenir sur les rotules, lessivés par des afters jusqu’au petit matin.
Fêtards invétérés mais sans le sous, les quatre garçons apprécient de faire partie d’une scène hexagonale qui compte dans ses rangs des formations amies : les Madcaps, bien sûr, mais aussi Sudden Death of Stars, Baston, Sapin, Volage, Marietta… « On a tous nos différences, assure Adrien, on se stimule tous, il n’y a aucune concurrence. C’est un cercle vertueux, qui donne de la crédibilité au label. » Le label en question c’est Howlin’ Banana, qui signe et distribue tout ce que la France compte de groupes rock à tendance garage, mais surtout à l’esprit DIY, depuis sa création en 2011 par un jeune passionné aux lunettes rectangulaires et aux rouflaquettes fournies, Tom.
Quant à l’avenir, Adrien et Léo y pensent peu, ou font semblant tout du moins. Tous deux cherchent un job à Paris, tandis que Vincent et Jérémie terminent leurs études à Rennes. S’ils vivent pour l’énergie rock, celle qui vide la tête, les jambes et le cœur, ils ne font pas de plan sur la comète. « On est un quatuor classique, qui chante en anglais. Je ne vois pas qui miserait dessus, on ne rapportera pas d’argent » lâche Adrien dans un sourire. Leurs albums forment pourtant la belle b.o. d’une jeunesse qui ne se prend pas au sérieux, adepte des rades, des bières pas chères et des après-midi passées à chiller. Celle que l’on retrouvera très certainement au premier rang de leur concert au Point Éphémère ce samedi 7 mai, ou à Rock en Seine cet été.
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