Jean-Daniel Beauvallet reprend du service pour répondre à votre insatiable soif de questions sur les sujets musicaux les plus pointus du monde.
Après avoir écouté 200 CD, répondu à 100 questions, fumé 30 clopes, bu une demi-bouteille de vodka, est ce que tu pourras me ramener une baguette de pain ? Merci.
Du pain, c’est facile à dire. Tu veux une baguette moulée ? Une baguette parisienne ? Ou du pain aux noix ? Du pain poilane, du pain Manzagol, du pain bi, du pain complet, du pain polka, du pain de seigle, du pain campagnard, du pain au son, du pain béni, du pain anglais, du pain au froment, du pain de gruau, du pain à la reine ? Ou alors, un album du groupe Dupain ? Ou une chronique de Jean-Baptise Dupin ? C’est que j’ai du travail, moi, j’ai pas que ça à faire, de me les rouler dans la farine à la boulangerie, j’ai encore 1264 albums à écouter aujourd’hui. Bon, OK, je te ramène un album de Bread.
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Le label Factory avait pour habitude de donner des numéros de catalogue à des trucs extra-musicaux (comme Fac 51 pour la Haçienda). En connais-tu des bizarres ?
Chaque traitement dentaire de Rob Gretton, le regretté manager de Joy Division et New Order, possédait son numéro de catalogue chez Factory. Les cycles menstruels les plus douloureux de la secrétaire de Tony Wilson, le boss, ont également eu le droit à cette honneur. Même les Sex Pistols, grâce à une cassette obscure d’entretien, ont obtenu un numéro de catalogue Factory. La première référence du label était un poster signé, déjà, du graphiste Peter Saville, annonçant un concert à la soirée The Factory, qui avait lieu dans un club délabré de Hulme, Manchester. La seconde référence est un double single, sur lequel on retrouvait dès novembre 78 deux futurs piliers du label : Joy Division et Durutti Column (ainsi que Cabaret Voltaire et John Dowie). Le récent livre de Tony Wilson 24 Hour Party People, qui sert de trame au film de Michael Winterbottom du même titre (sortie en septembre en France, déjà distribué en Angleterre), possède lui aussi un numéro de catalogue : Fac 424. Le film raconte l’épopée du label, de ses groupes, de son club et de la scène du Nord en général. A ne rater sous aucun prétexte.
Salut JD. Au début des années 90, DC Basehead (alias Michael Ivey) a sorti deux albums de hip-hop enfumés et bucoliques. Et depuis, plus rien’
Notre rappeur-koala préféré n’a effectivement pas été le plus actif sur le front du hip-hop élastique et nonchalant. Il s’est gravement fait prendre sa place par tous les Blackalicious ou People Under The Stairs de la planète. Mais je sais par un ami commun qu’il a composé de nombreux titres, qui dorment dans des tiroirs, certains valant franchement le déplacement : une sorte de psychédélisme funky et furieux. Son dernier album officiel, après les géniaux Play With Toys (91) et Not In Kansas (93) a été Faith, en 96, qui n’a pas bénéficié (de mémoire) d’une distribution en Europe.
En 94, il avait également enregistré un album assez peu remarqué en France, BYOB, abréviation de Bring Your Own Bottle, panneau affiché à l’entrée des restaurants américains où l’on ne peut pas acheter d’alcool mais en consommer. C’est peut-être ça, son problème : à chaque fois que passe la pub Budweiser, j’ai l’impression de le revoir. Wasssssssssssup ?
Salut, J.D. J’aimerais en savoir plus sur le canadien Hayden… Quel(s) albums me conseillerais-tu ?
Le groupe a fait l’erreur typique de signer un contrat discographique pour un somme colossale avec une major américaine. Il s’est donc endetté jusqu’au cou auprès de sa maison de disques, qui attendait froidement un retour sur l’investissement. La maison de disque en question était certaine à l’époque que le groupe dépressif remplacerait sans histoire Nirvana dans le c’ur des ados perturbés… Depuis, Hayden a retrouvé sa liberté et enregistré quelques albums sur des labels indépendants. Mon préféré reste le terrifiant Everything I long for, mais les plus récents The Closer I get ou Moving careful peuvent aussi mériter l’amour.
Cher JD, peux-tu me donner la liste des albums de Shack ?
La discographie post-Pale Fountains des frères Head commence avec Zilch, puis avec l’album Michael Head introducing The Strands, suivi de la compilation Water Pistol. Le groupe de Liverpool devra attendre HMS Fable en 99 pour obtenir un début de reconnaissance en Angleterre.
Une poignée de singles valent également le déplacement (même en rampant) : Somethin’ like you, Oscar, Natalie’s Party ou I Know you well.
Des Pale Fountains, il faut bien entendu posséder les trois albums (dont le dernier posthume) : Pacific Street, From Across The Kitchen Table et Longshot for your love. Le label belge Les Disques Du Crépuscule possède dans ses coffres-forts de quoi confectionner un album entier avec les chansons enregistrées pour la structure bruxelloise avant le pont d’or offert au début des années 80 aux Liverpudliens par Virgin.
De quelle nationalité était le compositeur Varese ?
Edgard Varèse est né à Paris en 1883. Il a été encouragé, dès son plus jeune âge, à se lancer dans la composition par, notamment, Debussy en personne. Une vocation soutenue, quelques années plus tard par d’autres amis, comme Erik Satie ou Richard Strauss. Il fut l’un des premiers à affirmer que la musique se devait de prendre en compte la science et fut un pionnier en matière de musique électronique. Il partit vivre et composer aux Etats-Unis dès le début de la seconde guerre mondiale et y composa Amériques.
Varèse est mort en 1965 à New York. D’Aphex Twin à Sonic Youth, ses albums, comme Ionisation, Poeme Electronique ou Hyperprism, sont aujourd’hui de véritables objets de culte.
Est-il vrai que Fatboy Slim a monté son propre label ?
Effectivement, Norman Cook tient les rênes du label Southern Fried, qui se spécialise dans la house détraquée et euphorique. Un label plutôt axé sur le dancefloor, qui ne sort pour l’instant que des maxis. On recommande chaudement ceux de Grandad Bob ou, surtout, de The Space Cowboy. Surtout Just Put Your Hand In Mine, une bombe sous haute influence française (l’axe Stardust/Alan Braxe de la mélancolie joyeuse).
Salut JDB, j’ai vu dernièrement les sublimes BRMC en concert à la Boule Noire à Paris. Je voudrais savoir si tu connaissais le groupe en première partie et si tu pouvais m’en dire plus sur eux.
Le groupe en question s’appelle Vue et vient de San Francisco. Leur chanteur, qui croit vivre en 1966, s’appelle Rex Shelverton. Il a des chemises super-classes, les mêmes que votre mère a depuis des années cachées au grenier, avec le Petit Livre Rouge, des chichons entamés, quelques vieux exemplaires d’Actuel et des illusions trahies dans des cartons ficelés. Avant de s’appeler Vue, le groupe avait choisi le nom de The Audience, comme les insipides nullards anglais qui servaient de backing band à la starlette vulgos Sophie Ellis-Bextor, cette idole des gommeux qui ont grandi en se pignolant sur les pages trois tue-l’amour du Sun.
Leur premier album est sorti l’an passé sur le label de Seattle Sub Pop, qui distribue également l’excellent nouveau single du groupe, Picture Of Me. Le groupe pourrait revenir en France, en première partie de (And You Will Know Us By) The Trail Of Dead.
Pouvez-vous m’expliquer pourquoi nous n’avons pas les mêmes goûts ? Suis-je normal ou suis-je un con ?
Alors comme ça, il pourrait y avoir une opposition, une incompatibilité même entre ?être normal’ et ?être con’. Donc, si je comprends bien, les gens hors-norme sont des cons et les gens ordinaires tout à fait fréquentables. On est con ou on est normal… Bien. Je comprends mieux pourquoi nous n’avons pas les mêmes goûts. Décidément, les gens normaux n’ont rien d’extraordinaire.
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