Retrouvailles émues entre deux monstres sacrés du piano et de la contrebasse.
Ensemble, et dès 1968, ils ont écrit l’une des plus belles pages du jazz moderne. Puis, leurs trajectoires ont divergé : pédagogue libertaire et curieux de tout, le contrebassiste Charlie Haden a joué au sein du Liberation Music Orchestra. Keith Jarrett, panthéonisé de son vivant comme le plus important pianiste de sa génération, n’a pas toujours évité l’écueil de la complaisance. Chacun de son côté, en parallèle, ils ont retrouvé leurs racines (la country pour le premier, la magie des standards revisités en trio pour le second), puis se sont retrouvés tout court après trente-trois années de séparation.
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Affecté d’une maladie rare qui le laisse périodiquement exsangue, le pianiste n’en a pas moins ouvert les portes de son studio du New Jersey (une vieille grange, en fait) à cette succession de duos intimes, spontanés, d’une bouleversante complicité. Deux gentlemen sensibles se retrouvent les yeux fermés, dans les ténèbres bleutées d’un jazz fraternel et sensible. L’émotion générée par cette session impose que l’on se raccroche à quelques branches : ici, la profonde empreinte de la luminosité de Bach dans le jeu de Jarrett ; là, les notes de la contrebasse posées sur la partition comme de sombres présents ; plus loin, le miraculeux équilibre entre les deux pupitres.
Les deux instrumentistes sont techniquement exemplaires. Mais leur musique va bien au-delà, balançant pardessus les moulins ego et ostentation. On est vite submergé par l’émotion de ces airs timides et immortels (Body and Soul) et la délicate interprétation qui en est faite. Jasmine débute par quelques secondes de silence, suivies d’un chef-d’oeuvre.
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