Is, c’est surtout un morceau de plus de dix minutes : The Brain, improvisation tonitruante du pianiste Chick Corea, porté par le jeu de batterie pyrotechnique de Jack DeJohnette. Cela démarre par une exposition assez lyrique du thème. La sonorité est claire, les enchaînements limpides et détachés. Puis tout s’emballe peu à peu. Le jeu […]
Is, c’est surtout un morceau de plus de dix minutes : The Brain, improvisation tonitruante du pianiste Chick Corea, porté par le jeu de batterie pyrotechnique de Jack DeJohnette. Cela démarre par une exposition assez lyrique du thème. La sonorité est claire, les enchaînements limpides et détachés. Puis tout s’emballe peu à peu. Le jeu devient plus déstructuré, emporté par un torrent de notes, d’accords plaqués avec force et insistance, de retours obsessionnels. Bennie Maupin, grand saxophoniste oublié malgré son rôle majeur au sein des Headhunters, poursuit par un chorus épais, intense.
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Suit This, titre aussi énigmatique. Chick Corea est au clavier électrique. Entre orgue et synthé, l’instrument offre des couleurs indéfinissables. Des nuances de teintes claires ou sombres. La main gauche imprime des sons opaques. La droite dévale le clavier dans des enchaînements ultrarapides. Final de ce triptyque : Sundance, mélodie presque sucrée de prime abord, hantée ensuite par un détournement de plus en plus rageur, tourbillon lyrique, dansant, brûlant, avec le quartette augmenté du flûtiste Hubert Laws et du trompettiste Woody Shaw.
En 1969, les musiciens de jazz sont au carrefour de plusieurs révolutions. Le free-jazz finit de cracher sa colère. La fusion fascine les plus curieux, surtout parmi les pianistes, sollicités par l’arrivée de nouveaux instruments. Les jeunes Corea, Dave Holland et Jack DeJohnette viennent d’être recrutés par Miles Davis, lequel tolère leurs improvisations juvéniles et turbulentes, leur usage immodéré des distorsions. Les trois prolongent leurs explorations lors d’une session d’une grande liberté de ton. Enregistré quelques mois avant le tournant que représentera Bitches Brew, Is cristallise ce foisonnement d’intentions. Il y reste la vigueur d’une expression avide, parfois quasiment frénétique, le souci esthétique d’un styliste du piano (de formation classique) et la tentation des nouvelles voies ouvertes par l’avènement de groupes « électrogènes » majeurs dans la pop, le rock et le jazz.
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