“A combien se chiffre au juste la tribu du Wu-Tang Clan ?”, entend-on régulièrement. Réponse : vous n’avez pas fini d’en baver avec neuf MC’s de base et une nébuleuse de disciples dont la notoriété ne cesse d’enfler, tel Cappadonna, partenaire remarqué de Ghostface Killah sur ce nouveau brûlot. Ghostface ayant lui-même fait ses griffes […]
« A combien se chiffre au juste la tribu du Wu-Tang Clan ? », entend-on régulièrement. Réponse : vous n’avez pas fini d’en baver avec neuf MC’s de base et une nébuleuse de disciples dont la notoriété ne cesse d’enfler, tel Cappadonna, partenaire remarqué de Ghostface Killah sur ce nouveau brûlot. Ghostface ayant lui-même fait ses griffes sur l’album de Raekwon The Chef l’an dernier, Iron man en est le prolongement direct : loin de la philosophie de The Genius et de l’humour branque de Ol’Dirty Bastard, ce sont les récits de deals de drogue foireux et de crimes mafieux inspirés de Casino qui hantent la majorité de ses rimes. Sur le point de baisser les bras, épuisé par cette rhétorique de la violence absurde, l’auditeur rebondit d’abord sur l’urgence du phrasé de Ghostface, sur son débit haletant, comme saisi en pleine course, une meute de flics déchaînés aux trousses. Simultanément, la recherche musicale de The RZA dont on redoute régulièrement la panne sèche ou la redite sidère une fois encore. Travail colossal résumant et transcendant ses précédents projets, ces 75 minutes font du producteur-stratège du clan une inégalable usine à trouvailles, capable de se renouveler et de progresser à chaque étape en dosant subtilement les expériences sonores grâce à une maîtrise diabolique des arrangements. Un RZA à qui l’on doit ici le tourment palpable de Camay, la menace orageuse d’Assassination day, la dépression poignante de Motherless child, la dynamique affolée de Daytona 500 ou la fascinante déglingue de The Soul controller et Marvel. Dans le registre douloureux, Motherless child, sur une enfance brisée, s’affirme comme son titre le plus achevé, alors que Wildflower, histoire d’une trahison amoureuse, est chargé d’une violence misogyne et d’un dégoût ahurissant propre à estomaquer les plus blindés. Enfin, sans doute bien malgré eux, Ghostface et ses partenaires Raekwon et Cappadonna forcent le sourire avec ces rimes caricaturales extraites de Camay : « Je suis si heureux de t’avoir trouvée au rendez-vous/Comment va la vie ?/Tes mains sont plus douces que le savon Camay/Patron, une bouteille de château chablis pour la table trois. » Une indéniable réussite où, pour une fois, les cancres en anglais perdent peu au change.
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