Trois ans après le raffiné L’Héroïne au bain, intermède pendant lequel il aura triomphé avec Nouvelle Vague en binôme avec Marc Collin, Olivier Libaux ne lâche pas l’affaire.
Homme des objets musicaux pas ordinaires, il papillonne dans les airs sans se poser sur un genre précis. Son Héroïne, servie par une multitude d’interprètes et porteuse d’une ambition irréalisable, resta ainsi une comédie musicale jamais montée. Les leçons tirées, Imbécile apparaît plus modeste : quatre personnages, un huis clos autour d’une table, des chansons en robes légères qui seront, une fois en scène (c’est le but), accompagnées de dialogues. Du théâtre chanté, donc, appuyé par une atmosphère fifties un peu cireuse qui fait plus volontiers référence aux dramatiques ORTF qu’au Living Theatre.
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Un casting idéal – JP Nataf, Katerine, Helena Noguerra et Barbara Carlotti – et l’habileté de Libaux à tracer des situations en quelques lignes féroces ou attendries, reliées par une poignée d’airs qui s’incrustent vite en mémoire, emballent cette histoire que l’on devine plus sournoise que les apparences le laissent croire. Puis, au milieu, arrive L’Amour à la française, entonné dans un quadrille joyeux, et une illumination nous saisit. Entre ces lignes grivoises – “T’es pendu au cul de ton Anglaise, y’a le feu dans ton pantalon (…) Fais l’amour à une Française, ce sera bien mieux qu’à London” – c’est toute une symbolique qui est mise à jour.
Il y a quinze ans, avec son groupe Les Objets, Libaux tentait la greffe entre une certaine pop anglaise stylée – Smiths, Monochrome Set – et des mots français allégés du poids hexagonal de la chanson à texte. L’heure est plus clémente, désormais, pour faire valoir, sans complexe pour l’autre rive de la Manche, un héritage qui va de Rezvani/Bassiak à Dick Annegarn, passe par Gainsbourg – on pense à la désinvolture assumée d’Anna – et entraîne en route des poussières de Brassens ou même de Barbara – via Carlotti. L’emballage acoustique et fluide produit de belles étincelles avant l’embrasement final que constitue le splendide Je prends l’air et je prends l’eau chanté par un Nataf en lévitation. Même si, là, l’influence du songwriting anglais – Kinks, Macca – refait soudainement surface. Seuls les imbéciles…
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