Danser sur de la techno dehors en plein hiver dans un froid polaire, il n’y a qu’au Igloofest de Montréal que l’on peut vivre ça.
Après des débuts timides en 2007 où pendant deux soirées 4 000 personnes se sont déplacées pour entendre les 8 artistes au programme, l’événement montréalais a pris une ampleur considérable au fil des ans. Aujourd’hui, le Igloofest c’est deux scènes où se produisent en moyenne 75 artistes sur les quatre weekends que dure le festival, à raison de trois soirs par semaine du jeudi au samedi. Pour sa dixième édition, l’événement a attiré plus de 79 000 festivaliers dans un site complètement modifié avec notamment un réaménagement de la deuxième scène, plus grande et plus facile d’accès.
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Le festival, qui s’échelonnait du 14 janvier au 6 février, a démarré fort avec Bonobo, suivi le lendemain du pionnier berlinois Paul Kalkbrenner qui a proposé un set solide mais plus mélodique, puis ce fut au tour de l’égérie locale Misstress Barbara, adepte des gros beats, et du légendaire Kenny Dope – qui a remplacé le vétéran britannique Dave Clarke au pied levé – de clore ce premier weekend sauvage où 25 000 festivaliers s’étaient donné rendez-vous.
“Cette année on a investi plus d’argent dans la prog afin d’aller chercher des noms plus rassembleurs sans toutefois tomber dans l’EDM”, admet Michel Quintal, directeur de la programmation et cofondateur de Igloofest.
En effet, histoire de souligner de belle façon son dixième anniversaire, le grand rassemblement hivernal proposait une programmation éclatante, probablement la plus belle de toute son histoire. Outre le triplé tout étoile du premier weekend, on a pu voir et entendre Carl Craig, Brodinsky, Benjamin Damage, Modeselektor, les Martinez Brothers, Jimmy Edgar, DVS1, Rone, Maceo Plex, Mr Oizo, Heidi, Sébastien Léger, Swindle et Michael Mayer pour n’en nommer que quelques-uns.
Fidèle à ses habitudes, Igloofest fait toujours la part belle aux bidouilleurs locaux ou canadiens qui composent grosso modo 50 % de sa programmation. Tiga, Lexis, Black Tiger Sex Machine, Maus, Soundshaper, Poirier, Shaydakiss et Sleepy Tom ont entre autres pris part aux festivités. Mais outre la musique, il y a aussi tout l’élément visuel à prendre en considération. Ainsi, d’une soirée à l’autre, plusieurs VJ locaux se succèdent pour colorer les lieux de mille et une projections et d’effets visuels.
Glacial et chaleureux
En dehors de l’aspect artistique d’un festival, ce qui compte ce sont les lieux, l’ambiance et les gens. Aller au Igloofest, c’est vivre l’hiver montréalais d’une autre façon, le temps de quelques heures.
“Les gens retrouvent un peu leur cœur d’enfants quand ils viennent à Igloofest, un peu comme quand t’es petit et que l’école est fermée parce qu’il y a une tempête de neige”, poétise le directeur de la programmation.
Le site, localisé dans le Vieux Montréal juste au bord d’un fleuve Saint-Laurent complètement gelé, a quelque chose de féerique ; un palais des glaces délirant où les festivaliers extatiques, emmitouflés des pieds à la tête, déguisés, certains costumés dans des vêtements de ski kitsch aux couleurs fluo criardes pour espérer remporter le célèbre concours Iglooswag du plus horriblement beau look, se laissent emporter par une douce folie grisante. L’air est frais, le son est bon et l’ambiance est cool, à des lieux des manifestations esthétiques et plastiques de certains festivals de musique électronique.
On va à Igloofest pour l’expérience et bien sûr pour danser. De toute façon, on n’a pas trop le choix car quand le mercure atteint les moins 35 degrés – ceux qui ont subi les hivers montréalais de 2014 et 2015 s’en souviennent – le seul moyen de se réchauffer, si on ne se réfugie pas dans la grande salle à l’entrée du site ou autour d’un des nombreux feux de bois répandus ici et là sur le site, c’est de plonger au cœur de la foule où la température peut augmenter de 8 degrés. On se colle et on danse. Ceci dit, cette année, grâce à un petit coup de pouce de El Nino, les festivaliers n’ont pas trop souffert du froid et nombreux sont ceux qui sont allés se geler les fesses sur la glissade de glace ou se sont essayés au lancer du sapin.
Fondre la glace
Les moments forts de cette dixième édition sont nombreux mais on retiendra surtout le set de trois heures de l’Américain d’origine cubaine Maceo Plex qui, avec une techno très dynamique et chaleureuse, a tout ce qu’il faut pour faire lever la foule. Il ne faut pas non plus passer sous silence l’impeccable prestation de l’Allemand Paul Kalkbrenner. Soulignons aussi les adieux du label 50Weapons venu tirer sa révérence en famille en compagnie de Truncate, Shed, Benjamin Damage et bien sûr de Modeselektor qui se sont lancés dans deux sets, un DJ et un live.
S’ajoutent à cela quelques surprises, en particulier le set bigarré du Britannique Swindle où se croisaient hip-hop, dancehall, grime, UK bass et drum’n bass/breakbeat ainsi que celui plus mélodique et convivial du Canadien Sleepy Tom, programmé sur la deuxième scène.
“Danser dehors dans la neige est un peu contre-nature, précise Michel Quintal. Les programmations de festivals se ressemblent un peu toutes, autant dans l’électro que dans le rock ou l’indie. Là où le Igloofest se démarque, c’est grâce son environnement, les lieux et le fait que ça se passe dehors dans la neige et le froid et en pleine ville de surcroît. C’est là où on est complètement différent des autres festivals electro. D’aller se crisser dehors au frette (au Québec, quand il fait très froid, on dit qu’il fait “frette”, ndlr) à – 30 peut être un inconvénient pour certain mais pour d’autres cela a quelque chose d’exotique.”
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