Pour sa 7ème édition, le festival Iceland Airwaves présentait plus de 120 artistes sur quatre jours. Si l’on est aujourd’hui bien loin des débuts confidentiels des premières années, le festival islandais a pourtant su sauvegarder au fil des années son esprit défricheur. Morceaux choisis de trois jours et trois nuits dans le grand nord musical.
Répartis dans les six principaux lieux de la nuit de Reykjavík, le festival débutait officiellement dès le mercredi. Arrivés sur place le vendredi, on n’aura pas eu la chance de voir Apparat Organ quartet, New Radio, Annie ou bien encore José Gonzales. Qu’à cela ne tienne, on va se rattraper sur le reste.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
On commence par se rendre au musée d’art contemporain pour une soirée sponsorisée par le magazine métal américain Kerrang. On ne peut pas dire que cette caution soit rassurante, bien au contraire mais en Islande rien ne doit être interprété d’un point de vue français. Les horaires de passage sont respectés à la lettre et on rate Singapore Sling. Dommage, on aurait bien aimé voir l’ami Bardi Johanson (plus connus en tant que leader de Bang Gang) faire le « session guitarist » d’un groupe rock tendance « heavy ». Du coup, on débute les hostilités avec Dr Spock, combo de punk rock métal mené par deux hurleurs tout aussi effrayants l’un que l’autre.
Quelque peu effarouchés par les beuglements, on file direct à Nasa pour découvrir les Au revoir Simone. Venues tout droit de Brooklyn, les trois new yorkaises nous offrent un live electro pop sans grande originalité. On file ensuite jeter une oreille à Ghostdigital, projet de Einar, ex Sugarcubes. Selon nos guides, les performances du bonhomme sont toujours étonnantes d’énergie. Force est de constater qu’on ne nous avait pas menti ! Dès les premières notes, Ghostdigital déverse une pluie de beats concassés, rehaussés par un mur de guitare noisy à faire peur à Nine Inch Nails. L’ancien Sugarcubes est accompagné de son jeune fils de 13 ans et fait preuve d’une hyperactivité surprenante sur scène.
Cela fait à peine deux heures que nous sommes arrivés et déjà l’éclectisme des artistes rencontrés est saisissant. La proximité des différents lieux, tous en plein centre ville, permet au festivalier de naviguer très rapidement de salles en salles tout en s’imprégnant de l’atmosphère de la ville. Dehors, le thermomètre est déjà passé sous la barre du zéro. Retour à Nasa, principal club de Reykjavik qui accueille la majorité des artistes internationaux, pour découvrir Metronomy, anglais dont on commence à entendre beaucoup parler grâce à des remix de Roots Manuva et Franz Ferdinand. Seul sur scène, Joseph Mount aka Metronomy déçoit dans son « petit » live electro principalement orchestré depuis son laptop. On aurait préféré voir le garçon accompagné de son fidèle groupe « The Food groups ».
Manque de puissance, manque de présence scénique. Le duo suédois de Lo Fi Funk ne rattrapera pas le coup avec une house au rabais des plus ennuyante. Notre salut viendra d’une troupe d’allumés australiens répondant au nom improbable d’Architecture in Helsinki qui mettent enfin le feu au club bondé. La joyeuse fanfare sonne comme une rencontre entre !!!, The Rapture et Devandra Banhart (et restera à n’en pas douter l’un de nos meilleurs souvenirs de ce festival). Poussés dehors par la faim, on passe rapidement dans le sous sol du Théâtre National (Pjooleikhuskjallarim en Islandais sans les accents’) pour voir Stranger, rien à signaler
Après avoir échoué à l’entrée du mythique bar Sircus archi-bondé, on se dirige à Pravda, sorte de petit club branché en plein centre de Reyjavik. Arrivés ici sans idée précise, on tombe sur la performance des Donna Mess, soit les copies parfaites des Chicks on speed.
Plus ivres que séduits, on hallucine quand on apprend que les donzelles n’ont jamais entendu parler des trois chicks allemandes, tellement la ressemblance est aussi bien visuelle (mêmes costumes, mêmes couleurs fluo) que sonore (de l’electro jouée sur bandes). Bien qu’amusés, Mugison et sa compagne présent dans le public quittent Pravda, on fait de même pour regagner l’hôtel. Complètement frigorifié sur le chemin du retour, on croise des hordes d’Islandais et chose plus rare, d’Islandaises complètement ivres qui déambulent sur Laugavegur, la principale artère commerçante de la ville.
Les verres volent alors que les fêtards alcoolisés déambulent au gré du vent. Cette ambiance nocturne un peu trash surprend les bons gaulois habitués à l’ordre « Sarkozien » que nous sommes. La maréchaussée semble totalement absente de ce joli bordel alors que quelques belles blondes bien dévêtues titubent de bar en bar. En Islande, les bars restent ouverts toute la nuit et vu qu’elles sont longues et plutôt froides, la jeunesse islandaise fait la fête tous les week-ends malgré des prix exorbitants. Soufflé par la santé festive des nordiques, on ferme les yeux pour quelques heures de repos bien méritées.
Le samedi midi, on retrouve les membres de notre équipe pour faire un bilan de la fin de soirée avant d’enchaîner ça au Blue Lagoon. On se prépare pour la fameuse « Chill out Party » dans le cadre extraordinaire du Blue Lagoon. Bien qu’elles aient parfois des allures de bouillon de culture pour touristes en mal de sensations, les chaudes eaux bleues laiteuses du restent une expérience à vivre.
Aujourd’hui le petit plus, c’est la présence de Hermigervill, jeune prodige de l’electro islandaise, qui se charge de l’ambiance musicale. A mi-chemin entre live et DJ set, il délivre une très belle bande originale, parfaitement adaptée à cette après midi surréaliste au milieu des vapeurs sulfureuses. Devant lui, un parterre principalement composé d’étrangers se prélasse dans l’eau en sirotant une bière.
De retour en centre ville vers la fin de journée, les hostilités commencent au café Rheso. Reconverti en « Info Center » et village médias, le café Rheso est également l’un des lieux « off » du festival. Gunnkat prévu en ouverture ne fera jamais son apparition. Alors que le duo Johnny Sexual s’installe, on perçoit une excitation grandissante dans le lieu. En effet, l’un des deux protagonistes du duo, n’est autre que Sindri, le premier fils de Björk, aujourd’hui âgé de 19 ans. Dès les premières mesures, les flash et les caméras s’emballent. Sindri ne fait en fait pas grand-chose à part se trémousser sur des beats electro ultra conventionnels alors que son compère pousse la chansonnette. Rien de bien passionnant à se mettre sous les oreilles pendant les trente petites minutes de leur pseudo live (toute la musique est délivrée par un I Pod’).
Du coup, on file à Nasa pour voir Dr. Mister & Mr Handsome. Equivalent islandais de Prodigy, le duo electrokitsch se perd dans un show cabaret limite un peu morbide. Il n’est que 21h et la boite est pourtant déjà bien remplie. On file au Musée d’Art contemporain pour voir sur scène Jeff Who ? Son disque a accompagne nos trajets en voiture depuis notre arrivée.
Très inspiré par Franz Ferdinand sur disque, les entêtantes compositions de Jeff Who ? perdent malheureusement un peu de leur charme en live. On décide de retourner à Nasa pour voir Bang Gang. Alors qu’on arrive devant le club, une deuxième file d’attente s’est formée pour les accrédités et médias. De l’autre côté, dans la file du public, c’est l’émeute. La sécurité essaye tant bien que mal de contenir le débordement. Les gens qui font la queue ont payé leur billet mais ne peuvent pas rentrer. Le club est plein à craquer et même les artistes ne parviennent pas à y pénétrer ! Il faut dire que comme les autres soir Nasa accueille la majorité des artistes internationaux : Zoot Woman, Ratatat et surtout les Clap your hand say yeah, LA nouvelle sensation new yorkaise. Pour arranger les choses, les Gus Gus, quasi stars dans leur pays, doivent fermer le bal.
Surmotivés pour voir les new yorkais dont tout le monde parle, on prend son mal en patience. Mais plus l’heure tourne et plus les deux queues s’agrandissent sans que rien ne bouge et que personne ne rentre. Après deux heures dans le froid, écrasés par des mouvements de foules, nous devons nous rendre à l’évidence : on perd notre temps et n’arrivera jamais à rentrer. Dépités, nous partons arpenter les rues de Reykjavik à la recherche d’un endroit moins bondé qui voudra bien de nous. On retourne au musée pour voir The Zutons. Pas forcément fan du groupe déjà croisé l’année dernière au Zénith, on doit se rendre à l’évidence : leur folk rock survitaminé tourne à présent à plein régime en live.
De retour dans la rue, nous cherchons un endroit où faire un peu plus dignement la fête. L’accès au sous sol du Théâtre National semble possible. Pendant toute la durée du festival, le lieu est dédié aux musiques « douces ». On arrive pour la fin de The Rushes qui semble avoir conquis l’assemblée avec sa pop fraîche qui rappelle beaucoup Keane. Les subtils Ampop jouent ensuite. Découverts il y a quelques années dans le sillage de Sigur Ros et Mum, grâce au magnifique album Made for Market (le disque idéal pour s’endormir), Ampop semble être repassé à des rythmes plus rapides. Le public présent est composé de connaisseurs qui se délectent, sagement assis, des superbes mélodies du trio. Bien que charmé, notre vaillant collectif recherche une atmosphère un poil plus festive et surtout dansante.
Le Coffee shop 11 sera ce soir notre sauveur. Ce petit bar à deux étages qui ressemble à un petit pub irlandais n’a strictement rien à voir avec le festival Airwaves. Quand on entrouvre la porte, l’endroit est quasiment vide mais le Psychokiller des Talking Heads résonne à plein volume. Il ne nous en fallait pas plus. Après quelques breuvages revigorants, on se retrouve à y passer la nuit sans s’en rendre compte. Le lieu finira par être blindé à six heures du mat. A part trois hits à priori islandais, le DJ enchaînera tout ce que les 25 dernières années comptent de tubes, du bon (Pixies, Nirvana ) au moins bon (Abba ). Le côté étriqué du lieu facilite la rencontre avec les locaux. Pour cette dernière soirée, nous n’aurons sûrement pas découvert la fine fleur de la scène musique islandaise ni même vu la prochaine hype venue de l’autre bout de la planète, mais nous avons tous passé une soirée explosive et rencontré un bon paquet de nouveau amis islandais. De retour à l’hôtel vers 7h du matin, on croise quelques fêtards échoués dans les canapés de l’accueil, trop saouls pour avoir pu rejoindre leur chambre. Au petit déjeuner, une française perdue nous vantera les mérites du live des Gus Gus, apparemment rejoint par de nombreux featuring dont leur ancien chanteur. Tant pis.
Qu’il s’adresse au simple touriste ou bien au spécialiste musical, Airwaves est avant tout un merveilleux moyen de découvrir en quatre jours l’essentiel de la riche production musicale locale. Pour tout français qui souhaiterait se rendre au festival, il faut préciser que l’Islande est un pays très cher. Histoire de rentabiliser le déplacement, il vaut ainsi mieux prévoir d’y passer une petite semaine et en profiter pour découvrir la beauté saisissante d’une île aux paysages féeriques.
Côté festival, si la défection de dernière minute des Babyshambles fut vite oubliée, on regrettera tout de même les problèmes de files interminables à Nasa de centaines de personnes, pourtant munies du fameux bracelet. Le surbooking et la programmation de la plupart des têtes d’affiches y ont provoqué un effet d’entonnoir qui a atteint son paroxysme le samedi soir. On comprend aisément la colère des centaines spectateurs qui n’ont jamais pu rentrer malgré le fait qu’ils aient achetés leur pass. Mr. Destiny, société organisatrice de l’événement, devra absolument régler ce problème l’année prochaine afin de rendre toute sa splendeur à l’un des plus intéressant festival d’hiver.