Samedi 25 mai 2024, un an exactement après la disparition soudaine du chanteur auvergnat, une vingtaine d’artistes lui a rendu un vibrant hommage à la Coopérative de Mai.
Le 25 mai 2023, disparaissait brutalement Jean-Louis Murat, laissant une discographie aussi riche qu’imposante et un vide abyssal dans la chanson française. Un an exactement après, ce triste anniversaire ne pouvait rester lettre morte.
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Ainsi donc, autour de Denis Clavaizolle, complice historique et directeur musical du concert hommage Te garder près de nous – en clin d’œil à l’un des tubes de Cheyenne Autumn (1989) –, une vingtaine d’artistes étaient réunis sur la scène de la Coopérative de Mai à Clermont-Ferrand pour interpréter ses chansons en ce jour muratien hautement symbolique. Emploi du temps oblige, Dominique A, Camille ou Benjamin Biolay manquaient à l’appel, mais il fallait bien être à Clermont-Ferrand samedi 25 mai 2024.
Images d’Auvergne
Dans une salle où les 1 500 places avaient été vendues et où l’émotion était instantanément palpable, le concert s’ouvrait par une reprise du Col de la Croix-Morand par Morgane Imbeaud, l’une des régionales du soir avec laquelle Murat a souvent duettisé. Ce sont d’ailleurs les Auvergnats qui se succédaient au micro, entre une version électrique de Mujade Ribe par The Delano Orchestra (avec lequel il avait enregistré le triple album Babel) et une interprétation acoustique de Perce-neige par le guitariste Alain Bonnefont, compagnon de route de Jean-Louis Murat depuis le groupe Clara à la fin des années 1970. Attentif, le public voyait défiler sur l’écran géant des images filmées en Auvergne par l’équipe de Biscuit Production pour se replonger dans des paysages qui ont tant jalonné le répertoire muratien.
Après cette relecture de Perce-neige, l’album Dolorès (1996), absolu chef-d’œuvre, se taillait une place de choix dans le début du concert, avec Alex Beaupain, l’un des enfants spirituels de Murat, reprenant Le Train bleu et Fort Alamo, en duo avec Frédéric Lo. Autant d’indémodables chansons d’amour et de désamour traversant les décennies et nous frappant au cœur comme à l’époque : “Qu’il est dur de défaire/J’en reste KO”…
Une bouleversante chanson testamentaire
Quand Laura Cahen s’attaque au Mont sans-souci, on a la surprise de voir Sophie Clavaizolle, déjà présente sur les chœurs pour l’enregistrement de Mustango (1999), la rejoindre sur scène aux côtés de son père Denis au piano. Encore une fois, l’émotion traverse la scène en même temps que l’auditoire. Camarade littéraire de Jean-Louis Murat, l’écrivain Éric Reinhardt vient lire un extrait de son livre Cendrillon (2007), “écrit en écoutant en boucle l’album Taormina”, avant que Florent Marchet ne rythme la soirée sur l’air bossa du Mendiant à Rio, l’adaptation française d’Antonio’s Song de Michael Franks par “son professeur en mélancolie”. Sur Le Monde intérieur, le musicien et romancier a la bonne idée de varier les couleurs, vocales, pianistiques puis orchestrales pour ne pas ployer sous le poids de cette bouleversante chanson testamentaire.
L’une des surprises de la soirée, ponctuée par la voix off de Pascale Clark, est d’entendre chanter, pour la toute première fois, la réalisatrice Lætitia Masson, avec laquelle Murat entretenait une longue amitié artistique, sur L’Irrégulière/La Chanson de Dolorès, écrite à l’origine pour le projet d’album avorté avec Jeanne Moreau. En souvenir de Mustango, Elysian Fields et Matt Low, actuellement en tournée, ont envoyé leur version filmée de Jim, juste avant que Par.Sek, jeune trio local, ne vienne métamorphoser le cultissime Suicidez-vous le peuple est mort en mode post-punk/Suicide.
Les larmes montent puis s’évaporent
Les covers s’enchaînent, Jérôme Caillon (Rogojine) profite d’un unplugged des Jours du jaguar pour faire un clin d’œil aux Rancheros, le groupe récréatif de Murat dont il faisait partie et qui avait livré, le 19 juin 2002, leur unique et mémorable concert dans cette même salle de la Coopérative de Mai. Assise au piano, Jeanne Cherhal fait chavirer le public avec La Maladie d’amour, JP Nataf remonte aux sources du Troupeau (période Cheyenne Autumn) et se souvient de Gilet#4, charge anti-Macron que Murat avait enregistrée quand il avait documenté le mouvement des Gilets jaunes.
Le chanteur des Innocents, qui avait côtoyé Murat chez Virgin dans les années 1980, seconde Armelle Pioline (Holden) sur l’entraînante Foule romaine. Quand Morgane Imbeaud revient interpréter Le Cafard, les larmes montent puis s’évaporent (le single Sentiment nouveau par Frédéric Lo et Marie Audigier aux chœurs), jusqu’à se retrouver le souffle coupé dans la pénombre, en découvrant la version a capella de Je me souviens par Jean-Louis Murat, dont la voix nous déchire… Cela aurait peut-être été la conclusion idoine, fusse-t-elle éplorée, plutôt que la version chorale du Lien défait avec tous·tes les artistes réuni·es une dernière fois sur scène : “Oh, on se sent épris d’éternité/Mais revient toujours/Le temps du lien défait”.
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