On se souvient de l’immonde A horse with no name et on a tort de partir en galopant : il est temps de redécouvrir les faux Beatles America. C’est un groupe qui, au faîte de sa gloire, possédait un avion et des shorts de bain à son effigie. C’est surtout un groupe dont l’image adipeuse […]
On se souvient de l’immonde A horse with no name et on a tort de partir en galopant : il est temps de redécouvrir les faux Beatles America.
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C’est un groupe qui, au faîte de sa gloire, possédait un avion et des shorts de bain à son effigie. C’est surtout un groupe dont l’image adipeuse de bons gros babas aux cheveux filasse a longtemps fait figure d’épouvantail. C’est un groupe, enfin, qui traîne dans ses sandales un grain de sable pire qu’une vérole, un hit à faire passer
les Eagles pour la Fraction armée rouge : le malheureux A horse with no name. Derrière ce baobab, difficile d’imaginer qu’il se cache l’un des sous-bois les plus féeriques de la pop, l’une de ces clairières qui font croire à un mirage quand on les découvre. Il se cache surtout l’une des plumes les plus flamboyantes d’une décennie qui n’en compta pas des milliers.
Résumons, America (groupe formé en Angleterre par des fils de militaires californiens en mission d’après-guerre) était composé de trois membres, chacun interprétant ses propres compositions. Trois écritures et trois voix totalement différentes, hormis lorsqu’elles se fondaient entre elles pour créer les plus suaves harmonies entendues depuis les Beach Boys. Il y avait donc Dewey Brunnel, plutôt porté sur le folk à gros bras et les boggies arthritiques chantés avec une voix de tête (de veau) ; Dan Peek et son country-rock fleurant la paille mouillée ; et enfin Gerry Beckley, un pur génie. Sur les trois premiers albums, l’apesanteur mélodique de Beckley, dignement héritée d’un amour transi des Beatles (I need you, Only your heart) plaque au sol et enterre les compositions de ses compères, survolant les débats avec une aisance prodigieuse. Mais Beckley, peu enclin à laisser son minutieux travail d’orfèvre entre les mains potelées des producteurs américains, parvint à convaincre les deux autres d’aller frapper à la porte de Dieu, George Martin lui-même, qui les reçut, apprend-on dans le livret de ce vaste coffret, en ôtant ses chaussures. Sur le chef-d’œuvre Holiday, en 1974, Martin fait également retirer ses godillots à Brunnel et ses savates à Peek, tout le monde étant prié de chausser les mêmes ballerines que Beckley pour un album où le songwriting d’America peut sérieusement en raconter à celui des Fab Four. Sur leur lancée, America et Martin graveront en harmonie quatre autres albums jusqu’en 1979, sans toutefois atteindre d’aussi hautes cimes malgré, toujours, les efforts éblouissants de Beckley. Le dernier volume du coffret retrace la lente débandade du groupe après le départ de Peek et son total dénuement d’inspiration une fois les eighties venues. Beckley n’aurait sans doute pas dû prendre modèle sur son idole McCartney jusqu’au bout.
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