La deuxième édition du festival de danse de Brest est l’occasion pour Hervé Robbe, le chorégraphe « maison », de présenter sa création d’adieu.
Voilà qui est malin ! En donnant pour sous-titre « Les Antipodes » au festival Danse(s), le Centre national dramatique et chorégraphique (unique en son genre ?) de Brest s’autorise une programmation qui a l’immense avantage de contenter tout le monde. Les très médiatiques José Montalvo et son best-seller Paradis ainsi que Blanca Li et son fameux Stress drainent ce qu’il est convenu d’appeler un large public. Ils figurent au chapitre « grandes créations », une catégorie nouvelle qui fait un peu tiquer. Car enfin, qu’est-ce qu’une petite création, au juste ?
A noter, une programmation danse en région plutôt alléchante avec, au rayon classique, ces petites formes qui se multiplient désormais dans les festivals de danse. Si c’est une fort bonne chose, la recherche chorégraphique ayant viscéralement besoin de ces temps solitaires pour reprendre son souffle, c’est aussi le signe d’une réalité économique. Du côté des créations, elles restent le nerf de la guerre en termes de politique culturelle. Il y en a trois cette année, l’une de Sylvie Giron (longtemps interprète de Dominique Bagouet puis de Daniel Larrieu), Plupart du temps, la seconde d’Emmanuelle Huynh-Thanh-Loan qui ne saborde aucune étape : après son remarquable premier solo Múa, elle aborde le duo avec Dimitri Chamblas dans Tout contre. Enfin, Hervé Robbe, chorégraphe en résidence au Quartz de Brest depuis trois ans et sur le point de partir pour de nouvelles aventures, propose Bye see you next… no more. Titre moyennement ambigu qui appelait quelques éclaircissements. Etait-ce en rapport avec le départ imminent du chorégraphe pour une destination encore inconnue de l’intéressé ? Ou tout bonnement le contre-pied de son dernier spectacle V. O. qui dressait, sur un mode semi-documentaire, l’état des lieux de la danse contemporaine vu par son public. Avis de l’intéressé : « Je voulais dépasser le côté justification de la danse par rapport au public excusez-nous, on est danseurs… J’ai aussi voulu interroger l’ennui que je ressens en voyant pas mal de choses, où l’enfermement du conceptuel supplante complètement le sensible. » Voilà pour le côté manifeste. Concrètement, la pièce, construite en diptyque, délaisse les expériences plastiques et vidéographiques telles qu’elles purent s’élaborer dans Factory ou dans V. O. pour renouer avec la musique, partenaire « traditionnel » de la danse. En choisissant de la musique techno, fût-elle signée par le groupe expérimental Autechre, Hervé Robbe dit assez sa volonté de s’inscrire dans un courant artistique vivace. La sophistication de la texture sonore a permis d’installer une construction dramaturgique dont le principal propos consiste à déstabiliser tous les éléments mis en jeu (vocabulaire de la danse classique, hiérarchisation des corps et des espaces de pouvoir) pour créer une situation de perte qui aboutit à la destruction. Une certaine image de la déliquescence des choses qui débouche, malgré tout, sur un désir d’ouverture, la volonté farouche d’être, toujours, dans l’expérience du possible.
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