Digne sans être dingue, le nouvel album des Pixies prolonge une histoire qui continue de passionner. Rencontre avec Frank Black, un tonton du rock toujours cool et toujours libre.
Frank Black nous attend à la table d’un rooftop du XVIIIe arrondissement de Paris. Nous sommes au mois de juin et quelques rayons de soleil percent entre les parasols. Et puis d’un coup, un orage éclate. La vue sur la capitale se transforme en vision de cauchemar, distordue par le vent et les cordes d’eau qui tombent du ciel. Mais le leader des Pixies reste impassible, il préfère rester dehors “tant que le parasol tient le coup”.
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Il a l’air dans son élément pour évoquer Head Carrier, deuxième album turbulent depuis la reformation du groupe sur scène (en 2004, après onze ans d’absence), puis sur disque (en 2014, avec Indy Cindy). En sirotant un verre de vin blanc, indifférent à l’orage autour, Frank parle tranquillement de Kim Deal et de sa remplaçante, Paz Lenchantin, des choses qui changent et de celles qui ne changent pas, et puis de la place qu’occupe désormais la musique dans sa vie.
C’est marrant, quand on te suit sur Instagram, on remarque davantage ton amour pour la peinture que pour la musique…
Frank Black – Je suis heureux que la peinture soit entrée dans ma vie. Je me suis rendu compte que faire de la musique en solo, sans les Pixies, ça n’avait pas trop de sens pour moi, et que ça pouvait interférer avec le groupe. Contrairement à la peinture, la musique me permet de voyager et de gagner ma vie. Mais la peinture me permet de rester créatif d’une manière différente, qui n’interfère avec rien d’autre autour de moi. C’est mon espace privé.
Mais la musique et les Pixies, ça t’excite toujours ?
Oui, bien sûr, mais surtout quand on est dans le dur du travail, en studio ou en tournée. Le reste du temps, la musique est très séparée de nos vies respectives. Il y a comme une porte entre nous et les Pixies. Mais quand on l’ouvre, c’est tout un langage qui revient, un vocabulaire, et puis des gens, des habitudes, un monde en soi. Paz, qui n’a pas le même parcours avec le groupe, a beaucoup contribué à me faire voir les choses comme ça.
Avec ce nouvel album, vous avez annoncé que Paz faisait désormais “officiellement” partie du groupe. Qu’est-ce que ça change ?
Je ne sais pas trop, c’est différent. Son implication est différente. Nous l’écoutons différemment. Jusqu’à présent, elle nous donnait un coup de main en jouant de la basse. Elle avait une position incertaine, ne serait-ce que vis-à-vis des médias. On a jugé qu’il était temps pour elle de faire vraiment partie de la famille. C’est notre sœur adoptive.
https://www.youtube.com/watch?v=DUdWbv5fWvA
Ça fait quoi d’avoir une nouvelle personne avec qui travailler vraiment ?
C’est la meilleure chose qui soit arrivée aux Pixies ! Et je ne dis pas ça pour critiquer Kim Deal. Mais c’est comme dans une relation amoureuse : au moment de la séparation, on croit qu’on ne retrouvera jamais l’amour, que tout est foutu, qu’il ne se passera plus jamais rien. Et puis un jour… vous retombez follement amoureux.
Les chansons de Head Carrier, elles existaient déjà depuis un moment, ou bien elles sont toutes neuves ?
Ça dépend lesquelles. Chaque chanson a sa propre histoire. C’est impossible de faire des généralités sur un album entier. La plus vieille chanson, par exemple, je pense que c’est Um Chagga Lagga. Je l’ai composée il y a quatre ans, à l’époque d’Indy Cindy. Pareil pour Oona. Et puis dans le tas, il y a des choses très récentes, qui ont été enregistrées pendant la toute dernière session en studio. C’est le cas de All I Think about Now, où Paz chante seule. Je crois d’ailleurs que c’est mon titre préféré. Quand Paz chante, je peux écouter les Pixies comme un simple auditeur !
https://www.youtube.com/watch?v=yFAnn2j4iB0
C’est un morceau très nostalgique… En fait, on croirait entendre une nouvelle version de Where Is My Mind. Ce qui est assez ironique étant donné que c’est Paz qui chante…
Surtout que la chanson parle de Kim !
Ah ouais ?
C’est Paz qui m’a mis au défi de lui écrire une chanson sur Kim… C’est une sorte de lettre, mais écrite de façon très universelle – comme Where Is My Mind, d’ailleurs, à laquelle tout le monde peut s’identifier. On s’est rendu compte de la ressemblance entre les deux morceaux assez tard, pas du tout au moment de l’écriture. Je crois que cette impression vient du son de guitare. C’est une sorte d’accident.
Après deux albums et des dizaines de concerts, quel bilan fais-tu de la reformation des Pixies ?
Aucun. Je suis là, voilà, je fais des interviews. Je n’analyse pas trop ce genre de choses.
Tu es heureux ?
Ouais. Les Pixies sont un super groupe ! Et malgré les doutes qu’il y a parfois, nous avons plein d’opportunités et le choix de faire ce que nous voulons, sans aucun compromis, en étant exactement nous-mêmes.
concert le 23 novembre à Paris (Zénith)
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