À l’aube d’un retour en grande pompe auprès de ses acolytes de Blur, Graham Coxon publie son septième opus, et nous livre en vrac son obsession pour la mythologie grecque, la guerre et la folk des années soixante. Entretien.
[attachment id=298]Après avoir sorti six albums en huit ans, tu as laissé ce 7ème album en gestation durant trois années. Pourquoi avoir attendu si longtemps ?
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J’ai juste été fainéant, regardé la télévision pendant trois ans (rires) et passé du temps avec ma fille. Pour les premiers albums, j’étais pressé, porté par un sentiment d’urgence ; là, la première chanson a été écrite il y a trois ou quatre ans… La différence, c’est que durant tout ce temps, j’ai écrit beaucoup d’autres titres qui n’ont pas été enregistrés au final.
L’écriture a donc été plus dure que pour les précédents ?
Au contraire, elle a été plus spontanée. La plupart des chansons ont surgi sans vraiment savoir comment. Un titre comme November, c’est de l’improvisation totale. J’ai écrit les paroles dans un café, à un moment où je me sentais déprimé. Comme je ne pouvais pas me saoûler, la seule chose à faire était d’écrire un poème. À l’inverse, d’autres chansons comme In the Morning m’ont demandé beaucoup plus de temps et de travail.
En parlant de ce dernier titre, la ressemblance est particulièrement frappante avec le « Blackbird » des Beatles…
Non, pas tant que ça selon moi. C’est effectivement les mêmes notes mais je ne crois pas qu’elle m’ait particulièrement inspirée. Malgré tout le charme de cette chanson.
The Spinning Top semble plus apaisé. Gagnerais-tu en assurance ?
C’est vrai qu’il règne une atmosphère positive sur l’album, mais il me paraît impossible de la rattacher à un seul état d’âme en trois ans et demi de travail… Ça n’a pas été évident tous les jours, je suis passé par une quantité d’émotions différentes. Un titre plutôt joyeux comme In the Morning, composé à la campagne, contraste avec November, un titre plus sombre qui porte l’empreinte de Londres et de sa déprime ambiante.
Je ne me suis pas particulièrement senti plus à l’aise pour cet album, je reste quelqu’un de très nerveux. Dès qu’il s’agit de passer à l’enregistrement, le manque de confiance en moi revient au galop. J’aimerais pouvoir jouer simplement, m’asseoir et enregistrer mes compositions comme si de rien n’était, mais ça ne se passe jamais comme ça.
Tu as pourtant réalisé avec « The Spinning Top » ton premier concept album…
En écoutant les différents titres que j’avais composés, je me suis rendu compte qu’ils racontaient une histoire, celle d’un homme, de sa naissance à sa mort – au combat. Il suffisait de les ordonner pour que ça prenne sens. Le titre de l’album (ndlr la toupie) en découle, et fait référence à cette sorte de boucle qu’est la vie.
Est-ce une envie que tu mûrissais de longue date ?
Ça sonne un peu prétentieux de vouloir faire un album concept, mais je m’y suis tenu. Odessey and Oracle des Zombies, Tommy des Who, Parachute ou S.F. Sorrow des Pretty Things sont des œuvres conceptuelles qui m’ont marqué. J’y ai remarqué que la guerre tenait une place particulière dans chacun des récits, certainement parce que leurs auteurs sont nés durant la Seconde Guerre Mondiale. Cette génération a malgré elle été influencée par cette période – à l’inverse d’aujourd’hui où, bien que personne ne semble apprécier cette guerre (ndlr : en Irak et en Afghanistan) ne l’exprime pas pour autant artistiquement.
Ce qui m’intéressait ici était le point de vue du soldat, le personnage principal de cette histoire, qui meurt sur le front sur le titre Sorrow’s Army. Je voulais lui transmettre ma sympathie ; il n’a lui non plus rien à voir avec cette guerre, il n’a fait que son boulot.
C’est pour cette raison que tu lui accordes une seconde chance…
Sa mort était une sorte de prétexte pour introduire le rôle de cette magicienne, qui surgit de la mer Caspienne pour le ramener à la vie. Elle s’apparente à Médée, cette jeune femme dont s’est épris Jason dans sa quête de la Toison d’Or, et qui l’a protégé. The Spinning Top est en quelque sorte un mythe grec (rires).
[attachment id=298]À l’inverse de tes précédents albums tournés vers l’indie-rock, tu cites ici comme mentors de grands noms de la folk britannique des années soixante comme Davey Graham, John Martyn et Martin Carthy…
Ce sont des inspirations que l’on retrouvait déjà sur The Kiss of Morning (ndlr : son quatrième album sorti en 2002), mais qui effectivement guident The Spinning Top, un album en grande partie acoustique. Je suis fasciné par tout ce courant qui a émergé entre 1965 et 69 en Angleterre, cette fusion entre le blues et la folk, l’explosion qui en a suivi. J’aurais aimé vivre cette période, mais je l’ai ratée. Je n’avais que quelques mois… (rires).
En parallèle, on ne peut évidemment pas oublier ton retour au sein de Blur après dix ans d’absence. Comment appréhendes-tu cette reformation et la série de concerts qui s’en suit ?
Ça va être amusant ! Les répétitions ont commencé et c’est tout aussi excitant et agréable de retrouver ses amis. Chacun n’a finalement pas beaucoup changé : Alex (James) remue autant sa mèche qu’avant lorsqu’il joue (rires). Nous n’avons pas prévu de nouvel album pour l’instant, chacun étant pris par ses projets. Je sortirai un nouvel album solo tôt ou tard, j’ai déjà plusieurs chansons en stock dans un style totalement différent. Qui sonneront cette fois-ci plus 2066 que 1966 ! (rires)
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