Dans un récent magazine anglais, on découvrait héberlué que les Gorky’s Zygotic Mynci sont cinq jeunes gens un peu trop tranquilles, étrangement ordinaires. A ceci près qu’ils ont appris à chanter dans la chorale d’une église, qu’ils aiment pêle-mêle l’Incredible String Band, le krautrock, Gene Clark et T. Rex, et qu’il leur arrive parfois, tandis […]
Dans un récent magazine anglais, on découvrait héberlué que les Gorky’s Zygotic Mynci sont cinq jeunes gens un peu trop tranquilles, étrangement ordinaires. A ceci près qu’ils ont appris à chanter dans la chorale d’une église, qu’ils aiment pêle-mêle l’Incredible String Band, le krautrock, Gene Clark et T. Rex, et qu’il leur arrive parfois, tandis que le magnéto tourne encore, de briser des verres de vin sur le parquet des studios, afin disent-ils « d’évacuer la pression ». C’est ça, Gorky’s Zygotic Mynci : un concentré de flegme et d’élégance britanniques qui ne demande qu’à se diluer à la première pinte, au premier crissement de violon. D’ailleurs, du violon, il y en a partout sur Gorky 5, justifiant à lui seul l’étiquette folk qu’on a parfois tendance à coller hâtivement sur le front de ces Gallois. Mais un folk d’un genre un peu spécial, complètement barré aux amphétamines, un folk speed, passé par le prisme du punk et néanmoins psychédélique (psychiatrique ?), baragouiné de surcroît en gaélique, histoire de se marginaliser un peu plus. Pourtant, malgré l’obstacle de la langue, en dépit d’une instrumentation abracadabrante et de chansons sans queue ni tête mais vertébrées par des mélodies incroyablement riches en calcium , les quatre premiers albums de Gorky’s Zygotic Mynci ont rapidement établi le groupe comme une valeur sûre des charts indie anglais, à tel point que ces doux dingues émargent désormais chez une major. Le pire, c’est qu’on n’a même pas perdu au change. Au contraire, plus les disques s’accumulent, plus le songwriting autrefois puéril, vert pomme s’affine, plus l’univers de Gorky’s Zygotic Mynci s’illumine d’une cohérence, d’une consistance insoupçonnées. Gorky 5, au-delà des loufoqueries réglementaires (le tunnel lysergique qui joint les deux bouts de Softly, l’embardée russophile de Theme from Gorky 5), sonne un peu comme un adieu à l’enfance, entérine le passage des cinq babas à l’âge adulte. Ça se traduit par des paroles empreintes d’une drôle d’amertume (« On dirait que la fille de tes rêves fait des cauchemars »), par l’ampleur et l’opulence des arrangements, par l’ourlé des choeurs et le drapé des cordes, par une tonalité country-pop hautement mélancolique, par la fêlure bouleversante de la voix d’Euros Child, montée trop vite en graine et qui lutte à chaque refrain pour ne pas s’envoler aux quatre vents. Puisse-t-elle encore garder longtemps le cap de la sorte.
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