Give them enough rope (and they will hang themselves) : laissez-leur du mou (et ils se passeront la corde au cou). Le titre à lui seul synthétise tous les problèmes et tiraillements qui perturbent le Clash dès 1978. Après le franc-parler et les slogans épidermiques du premier jet, l’heure est aux questions, voire aux remises […]
Give them enough rope (and they will hang themselves) : laissez-leur du mou (et ils se passeront la corde au cou). Le titre à lui seul synthétise tous les problèmes et tiraillements qui perturbent le Clash dès 1978. Après le franc-parler et les slogans épidermiques du premier jet, l’heure est aux questions, voire aux remises en question. Du coup, Give em Enough Rope est un disque perpétuellement sur la défensive. On ne dit plus I’m so Bored With the USA mais Safe European Home.
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L’environnement qui accompagna l’enregistrement de ce second album tenait du bourbier, mais les titres gagnèrent, dans l’adversité, une puissance introspective du plus bel effet. Et c’est cela que souligna le producteur Sandy Pearlman, recruté lui aussi pour un brillant contre-emploi. Connu pour avoir donné forme et autorité aux principaux chefs d’œuvre du Blue Öyster Cult, il privilégiera l’énergie aux dépens du bouillonnement sanguin. Et ce n’était pas forcément un mauvais choix à cet instant charnière où le Clash se devait de prendre le pouvoir du mouvement punk ou de disparaître. En somme, Joe Strummer et les siens renforcent là les fondations de leur groupe pour déjà bâtir autre chose. London Calling, Sandinista : on connaît la suite, mais en cette période d’atermoiements commence son incubation.
Le Clash prend de l’assurance pour composer, sans trop céder de hargne et de fermeté. Après avoir imposé sa détermination, il apprend le maintien et l’audace. On le voit ainsi s’approprier le folk traditionnel d’English Civil War ou adapter le Mersey beat à la sauce destroy sur Stay Free. Côté rock aride, Last Gang in Town, Guns on the Roof ou Drug Stabbing Time assurent une arrogante relève, pendant que Safe European Home prouve le bien-fondé éventuel d’une production ajustée. Bien sûr, cette mise en plis à l’américaine, un peu clinquante, n’est pas toujours en adéquation avec les constats sociaux et les humeurs noires de Joe, mais Give em Enough Rope gagne, grâce à cette ambivalence, une force unique bien qu’amphigourique. Mine de rien, Mick Jones y réalise son rêve de rock-star, entretenu depuis ses Brats ou Delinquents (Mott The Hoople meets The New York Dolls en 1974), sans que Strummer ne trahisse la quasi-mission de service public du Clash. Grand disque, quoi qu’on en dise.
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