L’auteur du « Métèque » est mort ce matin. Il avait 79 ans.
Les eaux de mars ayant décidé de se prolonger jusqu’à mai, Georges Moustaki n’aura finalement pas attendu le retour des jours radieux dont certaines de ses chansons composaient l’une des bandes son idéales. Le chanteur est mort dans la nuit de mercredi à jeudi à l’âge de 79 ans, des suites d’une maladie des bronches qui le tenait éloigné des planches et des studios depuis plusieurs années, son dernier album, Solitaire, remontant à 2008.
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Né Giuseppe Mustacchi en 1934 de parents grecs à Alexandrie, en Egypte, Moustaki avait décliné son pedigree dans la chanson qui le fit connaître, Le Métèque, en 1969. « Juif errant et pâtre grec », il deviendra, au fil des voyages et des rencontres – musicales et féminines –, le plus Brésilien des Parisiens, ou un parigot de Rio qui avait notamment fait de la nonchalance mélancolique de la Bossa Nova l’un des arômes tenaces de son écriture.
Bien avant ça, dans les années 50, c’est sa rencontre avec Edith Piaf, dont il fut le jeune amant, qui le mettra pour la première fois en lumière avec Milord, diamant inaugural d’une rivière qui, dès-lors, ne cessera de couler et d’irriguer les répertoires des autres (Salvador, Montand, Gréco, Reggiani, la « longue dame brune » Barbara, et même Dalida), puis le sien aux lendemains de 68. Le Métèque, pourtant déjà enregistré par Pia Colombo cinq ans plus tôt, s’écoule à plus de 5 000 exemplaires par jour après un passage dans le Discorama de Denise Glaser, où la France encore secouée par le vent libertaire du mois de mai apprend à connaître ce chanteur à la voix délicate, bien que dangereusement gauchiste.
Avant d’embrasser à pleine bouche le Brésil, où il fera ami avec toutes les éminences locales (Ellis Regina, Gilberto Gil, Chico Buarque, Jobim et l’écrivain Jorge Amado), il s’intéresse à la musique du Moyen-Orient, par l’intermédiaire de l’ébouriffé Areski Belkacem et sa compagne Brigitte Fontaine, avec lesquels il constitue, sur l’île Saint-Louis, une bande de joyeux noceurs insulaires au cœur de Paris. Engagé contre les Colonels, de son pays d’origine, ou saluant le Printemps des Œillets au Portugal, il reste toute sa vie ce baladin toujours en alerte, son goût des jolies filles (exotiques de préférence) et des plaisirs terrestres n’empêchant pas les combats et les luttes à l’appel desquels il ne fera jamais défaut.
http://www.youtube.com/watch?v=DbeRF–jQpM
On imagine par exemple que depuis son lit d’hôpital, l’auteur de On est tous des pédés – un titre pourtant grinçant sur sa génération des « pseudo révoltés » – aura apprécié de partir sur un tel pas en avant de la société. Parmi les centaines de chansons qu’il laisse orphelines (Joseph, Ma Solitude, Sarah, Votre fille a vingt ans, Bahia…), c’est sa Philosophie qui sur le moment vient à l’esprit : « Nous avons toute la vie pour nous amuser, nous avons toute la mort pour nous reposer ». Une chose est certaine, George Moustaki s’est bien amusé.
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