[Numéro spécial Gainsbourg] Compositeur de l’album IRM pour Charlotte Gainsbourg, Beck regrette que les Américain·es n’aient jamais vraiment su parler de la musique de Serge Gainsbourg autrement que d’un croisement entre Dylan et Sinatra.
“J’ai découvert Gainsbourg avec Melody Nelson alors que j’étais en tournée en France avec Sonic Youth. Je n’avais jamais entendu si brillant mélange de rock et de cordes. Il y a quelque chose d’unique dans Melody Nelson, d’immensément expressif et naturel.
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Ce que j’aime chez Gainsbourg, ce sont ses constantes prises de risque et la grande diversité de son œuvre. Il a su être très raffiné dans son approche de la composition, parfois très classique, mais aussi totalement pop. J’aime aussi le fait qu’il ait toujours été très sérieux à propos de son art tout en sachant se moquer de lui-même. C’est une attitude très saine, mais ça demande beaucoup de courage.
Il avait une sensibilité très moderne, teintée de perversité et sous-tendue de pulsions autodestructrices qui, au début des années 1970, annonçaient déjà le punk rock. Ce qu’il y a d’intéressant dans Gainsbourg pour les Américains, c’est qu’il a traversé quarante ans d’histoire de la musique, jazz, chanson française réaliste, rock anglais, mambo, reggae.
“Aux Etats-Unis, ses fans sont généralement de jeunes urbains branchés”
Aux Etats-Unis, ses fans sont généralement de jeunes urbains branchés. Aux alentours de 1993-1994, ces gens-là ont commencé à en avoir marre du grunge et se sont tournés vers le passé. Les collectionneurs étaient à la recherche de choses de plus en plus obscures. Lorsqu’il n’y a plus eu de disques garage sixties à dénicher, ils se sont tournés vers l’Europe.
C’est là qu’on a commencé à entendre parler d’Os Mutantes, d’Ennio Morricone, de Piero Piccioni et de Serge Gainsbourg. Les Américains ont encore du mal à parler de sa musique. J’ai même entendu un jour parler de Gainsbourg comme d’un croisement entre Dylan et Sinatra !
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Gainsbourg ne correspond à rien de ce que nous avons pu connaître aux Etats-Unis en matière de musique. Il n’y a jamais eu et il ne saurait y avoir d’équivalent.”
Propos recueillis en 2001
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