Le début de Funeral, album du groupe montréalais The Arcade Fire, est probablement le plus beau de cette fin d’année. Ça commence par cinq premiers titres qui hérissent le poil, qui donnent envie de courir sans but, n’importe où et n’importe comment, un peu comme Denis Lavant dans Mauvais sang de Leos Carax. Dans ces […]
Le début de Funeral, album du groupe montréalais The Arcade Fire, est probablement le plus beau de cette fin d’année. Ça commence par cinq premiers titres qui hérissent le poil, qui donnent envie de courir sans but, n’importe où et n’importe comment, un peu comme Denis Lavant dans Mauvais sang de Leos Carax. Dans ces cinq premiers titres donc, toute la place est prise par une incroyable série de quatre, regroupés sous l’intitulé Neighborhood, simplement numérotés #1, #2, #3, et #4, comme ça, bien dans l’ordre, malgré toute l’anarchie émotionnelle qui peut régner sur le début du disque.
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Car, clairement séparés en deux grappes de deux titres par une chanson-pivot fragile et murmurée en français, Une année sans lumière, les quatre pièces de Neighborhood prennent aux tripes dans le désordre, comme seuls savent le faire aujourd’hui les groupes de Montréal, des Molasses à Godspeed You! Black Emperor (l’album a d’ailleurs été enregistré dans le légendaire Hotel 2 Tango, repaire sonore des deux groupes montréalais précités). Dans ces cinq premiers titres, mais comme dans tout le disque d’ailleurs, on retrouve beaucoup de guitares, pas mal de violon, pas mal de piano, mais aussi pas mal de rage, de trouille et de désespoir.
Funeral, œuvre du couple Win Butler et Régine Chassagne, accompagnés par de nombreux musiciens montréalais (dont Sophie Trudeau, violoniste de Gospeed), a été écrit tout au long de l’année passée, dans une période pas très glop, marquée par les décès successifs de plusieurs proches du groupe. D’où ce titre un peu rude, « Enterrement », d’où ce poids qui s’abat et pèse sur la majorité du disque, vraiment fulgurant et lumineux par endroits.
Et c’est peu de le dire, parce que plus on l’écoute, plus Funeral, sur la distance, parvient à tromper et à dérouter sur ses véritables intentions. Mélancolique et sombre, laissant souvent le renoncement l’emporter sur la révolte, le disque parvient aussi, quand il le souhaite, à inverser brutalement la tendance, à faire surgir, au détour d’une nappe de guitare, d’une partie de violon ou d’un passage très pop, ces belles et trop rares déflagrations soniques et symphoniques qui donnent envie de tout, sauf de baisser les bras.
Pierre Siankowski
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