Au bout de cet album qui marche d’un pas lent, cadencé par le tambourin et la cymbale, où le piano martèle le poids d’une histoire faite d’oppression et de discrimination, comme l’indique son titre, Wynton Marsalis prend le micro et se lance dans un rap. Le trompettiste interpelle les esprits révolutionnaires et impliqués des années […]
Au bout de cet album qui marche d’un pas lent, cadencé par le tambourin et la cymbale, où le piano martèle le poids d’une histoire faite d’oppression et de discrimination, comme l’indique son titre, Wynton Marsalis prend le micro et se lance dans un rap. Le trompettiste interpelle les esprits révolutionnaires et impliqués des années 60 arrivés aujourd’hui dans les rouages du pouvoir, résignés ou à l’arrêt dans une société marquée par la mémoire de l’esclavage.
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Pourfendeur du matérialisme qui dévoie ses congénères ? le hip-hop n’étant à ses yeux qu’un nouvel avatar de cette dérive consumériste, avec des artistes qui dénigrent les leurs dans leurs mots et dans leurs attitudes ?, Wynton Marsalis, souvent cantonné dans son rôle de gardien du temple jazz, se lâche. Dans un exercice emprunté à la tradition néo-orléanaise du juba juba (des joutes verbales populaires scandées dans la cité louisianaise), son verbe dénonce une Amérique atone qui vient de voir passer la guerre en Irak et la tragédie consécutive aux ravages de l’ouragan Katrina sans réagir. From the Plantation to the Penitentiary stigmatise ce continuum historique sur des rythmes lancinants et insistants, ceux du sud, du blues.
Avant cela, l’album ravive le goût de la romance et du swing. Le contraste du chant diaphane de la vocaliste Jennifer Sanon et des chorus incisifs du leader, pulsé par une rythmique magistrale : l’esthétique de cet enregistrement est alors conforme aux récents projets proposés par Wynton Marsalis. Mais le ton a changé, déterminé et impliqué. De la part d’un musicien de cette stature, ce manifeste politique (venant après d’autres, culturels et esthétiques) a de l’allure et va faire bouger les lignes’, comme on dit aujourd’hui.
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