Deux sorties, une même cause : le French dub est en marche et annonce l’imminence de son règne. Sur terre comme au ciel. Si le reggae a progressivement été récupéré par la mauvaise culture hippie et le militantisme geignard qui en ont achevé l’enlisement, le dub au contraire s’affirme de plus en plus comme l’un […]
Deux sorties, une même cause : le French dub est en marche et annonce l’imminence de son règne. Sur terre comme au ciel.
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Si le reggae a progressivement été récupéré par la mauvaise culture hippie et le militantisme geignard qui en ont achevé l’enlisement, le dub au contraire s’affirme de plus en plus comme l’un des courants les mieux adaptés pour faire la transition entre « basse culture » et langage numérique. Comme le soulignait Erik Davis dans son bouquin Techgnosis, le dub agit comme un solvant qui aide « à ronger les barrières artificielles trop souvent érigées entre les genres musicaux ». D’où cette liberté à explorer le cyberespace et le pouvoir de donner à l’auditeur excursionniste le sentiment d’un trip total, à la fois physique et spirituel. C’est donc à l’enracinement d’une authentique scène dub à la française que nous assistons, dont la particularité est de circuler au cœur d’un réseau jadis dévolu au rock alternatif, signe que cette musique, considérée par les moins avertis comme essentiellement planante, se révèle être le portail idéal pour un imaginaire hautement subversif.
Bien que légèrement inférieure à la première vendange, la French dub connection volume 2 donne une vue d’ensemble intéressante sur l’actualité du « dub it yourself » hexagonal avec une sélection de treize titres originaux qui, à l’exception des Djins et d’Aleem, ne présente aucune similitude de casting avec son aîné. Hormis quelques titres de commodité (Kayla entre West Coast jazz et brasiliana ou The Arrangers au schéma ambient), l’ensemble réserve des moments excellents, à défaut d’être cruciaux. St Germain étend ici sa philosophie touristique, exposée sur son récent album, avec aplomb et consistance, accommodant dans un volume d’espace-temps affranchi du moindre effet superflu, électronique et tribalité. Plus riche encore, Grant Phabao illustre à la perfection comment le dub, lorsqu’il se prête à cette dilatation sonore à visée cosmique, se rapproche des perspectives d’une afro-science-fiction survivaliste et révolutionnaire.
Car l’enjeu de ce nomadisme électroacoustique en apesanteur n’est pas de pure forme. L’intensité vibrationnelle vaut d’ailleurs au dub d’être autant un parent proche de la new thing chère à Pharoah Sanders et à Archie Shepp que du reggae roots. Si le reggae revendique des racines africaines, celles du dub sont avant tout dans le ciel, d’où cette capacité de projection et de divagation qui agrège au fil du voyage méditations et utopies.
Vu sous cet angle, la rencontre entre les Angevins de Zenzile (pensionnaires du premier French dub connection) et la poétesse afro-américaine Jamika est une aubaine. Elle n’est pas sans nous rappeler les prêches messianiques de Leon Thomas ou des Last Poets sur fond de jazz barré. Composé de six titres, ce ep est une jouissive construction de volontés, de basses fréquences, d’échos féconds et de poésie, une récréation intelligente et réactive à tout ce néogiscardisme de la French touch (pipi) qui ne sert à rien. Il annonce enfin l’ouverture d’un espace contre-culturel vraiment moderne et vraiment ouvert mais où seuls ceux qui ont la « vibe » ont une chance de s’en tirer.
ZENZILE Zenzile meets Jamika (Crash Records/Pias)
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