Avec leur huitième album studio, les Anglais retrouvent le chemin du dancefloor, leur audace musicale et la subtilité pop qui a fait leur succès.
En plus de vingt ans de carrière, Hot Chip, conduit de main de maître par les deux têtes pensantes Alexis Taylor et Joe Goddard, a marqué au fer rouge la dance anglaise, lui faisant prendre des libertés et des routes de traverse bienvenues.
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Ultra-prolifique, remixant à la pelle, mélangeant les genres avec une naïveté désarmante, menant de front projets solitaires et parallèles, écrivant ou produisant pour d’autres, s’affirmant comme une véritable machine de guerre en live, Hot Chip a fait le pont entre pop et club avec élégance et nonchalance.
Si le groupe nous a laissé·es en 2019 avec A Bath Full of Ecstasy, plongée dans l’hédonisme du dancefloor comme une remontée d’euphorie de synthèse, Freakout/Release pose tout à plat et remet les compteurs à zéro.
Hanté en filigrane par l’épidémie de Covid et ses inévitables répercussions sur la création, ce huitième album scelle les retrouvailles de Hot Chip et le plaisir collectif de composer en studio plutôt que par fichiers virtuels, histoire de renouer avec la dynamique et la spontanéité qui ont fait sa réputation. Une réunion de famille permise par leur nouveau studio, bien nommé Relax & Enjoy, situé dans l’East London et agencé avec minutie pendant la première année de la pandémie.
“Désormais, tout est allumé en permanence, on peut donc laisser libre cours à nos idées et empiler les margaritas” Alexis Taylor
“C’est un espace que nous avons construit avec en tête la manière dont nous concevons les disques de Hot Chip, explique Alexis Taylor. Nous sommes impatients de tester une nouvelle idée, et ce n’est jamais plaisant de devoir attendre que tout soit réglé pour commencer. Désormais, tout est allumé en permanence, on peut donc laisser libre cours à nos idées et empiler les margaritas ou improviser toute la nuit sans que notre manager nous sermonne à propos de l’argent dépensé !”
Une ouverture dansante et survitaminée
Freakout/Release est un disque marqué à la fois par la liberté que lui offre ce nouvel espace d’enregistrement, par la mémoire de Philippe Zdar (coproducteur de A Bath Full of Ecstasy) et par la reprise dynamitée du Sabotage des Beastie Boys, que la formation réserve à ses concerts dans un bain d’hystérie.
“L’idée de perdre le contrôle de manière positive a toujours été très présente dans l’histoire de la dance music, détaille Alexis. Notre version de Sabotage m’évoque les mêmes sentiments. Nous avions tous en tête l’énergie que dégage ce morceau lorsque nous avons entamé l’enregistrement du disque.”
S’ouvrant sur Down, bombe dansante et survitaminée par un sample vocal irrésistible tiré du More than Enough d’Universal Togetherness Band, Freakout/Release transpire la joie et l’innocence d’un groupe, heureux de se retrouver et de pouvoir lâcher la bride à son imagination, après ces périodes d’isolement.
“Ce disque, c’est l’histoire d’un groupe qui émerge d’une longue période d’hibernation” Joe Goddard
“Nous voulions créer quelque chose de manière naturelle, confirme Alexis, sans discussions interminables ni ambition démesurée. Notre seul souhait était de transmettre ce sentiment de jouer de la musique tous ensemble dans la même pièce. Prenez Down, nous nous sommes tous jetés sur les batteries, les synthés, les pianos, et le titre est ainsi né très vite dans une explosion d’énergie.”
Un yin-yang émotionnel
Mélange de tubes à danser et de ballades à chialer (un yin-yang émotionnel dont Hot Chip a fait sa marque de fabrique), l’album invite Lou Hayter, Cadence Weapon et leurs grands potes Soulwax. Retrouvailles aussi avec l’enthousiasme du groupe qui s’était légèrement estompé ces dernières années à force de s’éparpiller, mais surtout avec la magie bricolée qui transpirait de leurs meilleurs albums – Made in the Dark (2008) et One Life Stand (2010).
Élégiaque comme mélancolique, survolté comme apaisé, bucolique comme crissant, bourré de bombes en puissance (le deuxième single Eleanor en tête), Freakout/Release est le disque le plus grave d’une longue carrière, abordant la résilience, la joie d’être ensemble, les tensions raciales ou MeToo.
“C’est un album qui puise dans toute cette énergie refoulée et ce besoin d’évasion, qui tente de se saisir de cette anxiété et de cette agitation pour les transformer en émotions positives. Nous voulions capturer ce sentiment vertigineux et libérer toute cette tension accumulée”, avance Alexis Taylor, avant que Joe Goddard assène la sentence définitive : “Ce disque, c’est l’histoire d’un groupe qui émerge d’une longue période d’hibernation et se retrouve confronté à un monde nouveau et terrifiant.” On ne saurait mieux dire…
Freakout/Release (Domino/Sony Music). Sortie le 19 août. Concert le 8 octobre à Paris (L’Olympia).
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