Nouveau venu du rock nonchalant
et souillon, Best Coast incarne une
idée très californienne de la coolitude.
Depuis de longs mois, aux Etats-Unis, la best coast, c’est la côte Ouest, et plus particulièrement la Californie. Toutes les filles expéditives, explosives ou espiègles vous le confirmeront : Dum Dum Girls, Warpaint, Glasser, Zola Jesus… Brooklyn, ça fait tellement années 00…
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Best Coast, donc, comme nom idéal pour ce duo qui incarne une morgue et une nonchalance propres aux rockeurs avachis de Los Angeles, pas franchement la capitale américaine de l’urgence et de la tension. Un nom littéralement chevillé au corps : Bethany, chanteuse, s’est fait tatouer une carte de Californie sur un biceps – entre autres décorations de sapin de Noël trash.
De l’extérieur, Best Coast semble un bien étrange duo : Bethany très en avant, incarnant à elle seule le groupe, accompagnée d’un garçon, Bob, qui rase plus souvent les murs Côte d’or que sa barbe. Bethany aurait pu jouer tous les rôles dans le biopic consacré aux Runaways, à la fois butch et coquette, enjôleuse et enragée. Elle présente son acolyte Bob comme “(mon) ancien babysitter”. Il l’a donc connue bébé, avec une cuillère en or dans la bouche : de la vie, Bethany n’a connu que le rock’n’roll – son père était batteur de session.
Avec Best Coast, elle a tué le père : jusqu’à cet été et les grands festivals, il n’y avait pas de batterie dans Best Coast, mais une de ces boîtes à rythmes chétives qui rappellent les batteurs les plus étranges de l’histoire du rock : Bobby Gillespie chez Jesus & Mary Chain ou Mo Tucker dans le Velvet Underground. Minimum strict d’effets, maximum de puissance : un truc bien têtu, bien pesant.
Croisement de Hole, pour cette voix hautaine, à la limite de la vulgarité, qui cherche la castagne, et de Jesus & Mary Chain, pour ces mélodies ravinées par les pluies acides, fusillées contre le mur du son, ce premier album réinvente à son tour la surf-music : sur une planche à clous, sur une marée noire, quand bien même le soleil tape fort sur chaque refrain.
Crazy for You, qui rend effectivement dingo d’amour impur, prolonge ainsi l’été jusqu’à cet endless summer que recherchent les surfeurs et Phil Spector : on pensait ce groupe limité aux cavalcades euphoriques de singles sans lendemain, il se révèle aussi attachant sur la longueur, dénichant dans le goudron au moins une mélodie et une honnête raison de sourire par chanson.
Ça peut être une mélodie en sucre d’orge qui force à dodeliner même les porteurs de minerves, ça peut être une confession naïve de cette fausse dure qui collectionne sans doute encore les peluches de licornes et les posters des Cocteau Twins dans sa chambre d’ado.
Attention quand même : l’écoute répétée de cet album hautement slacker et enfumé peut faire perdre tout sens des réalités, faire perdre son travail, faire perdre sa famille. Mais on peut y trouver la joie, une immense source de jouvence, de liberté et d’innocence.
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