Père spirituel de Nick Drake et des songwriters les plus affranchis, le guitariste DAVY GRAHAM revient avec un nouvel album et des rééditions inestimables.
Jeudi 7 février 2008. L’homme qui monte sur la scène du Power’s Acoustic Room, un petit club de Londres, ne paie pas de mine. Sa démarche est hésitante, et son visage anguleux affiche les stigmates d’une vie consumée sans modération. Lorsqu’il saisit sa guitare acoustique, il paraît plus vulnérable encore : son jeu est un peu rouillé, sa voix mal assurée semble toujours au bord de se briser. Quelque chose d’incomparable et d’obstiné, pourtant, réussit à se frayer un passage dans cet agglomérat branlant de notes : une parole nue et affranchie, qui prend appui sur les ressorts harmoniques du blues et du folk pour se projeter au-dessus de tout vocabulaire connu.
Porté disparu pendant de longues années, Davy Graham, qui fut sans conteste le plus grand aventurier de la scène britannique des sixties, prouve ce soir-là qu’il n’est pas mort. Il n’est peut-être plus au zénith de son inspiration, mais il reste cet astre qui a éclairé et bouleversé l’histoire de la musique populaire.
Au début des années 60, les doigts de cet extraordinaire monte-en-l’air ont totalement changé la donne : le nombre de grilles qu’ils ont ouvertes, d’esprits qu’ils ont débloqués et de mains qu’ils ont libérées est incalculable. Sans Graham, la Grande-Bretagne ne serait pas devenue une terre aussi fertile en songwriters et en guitaristes prodiges. Sans lui, Nick Drake, Richard Thompson, Bert Jansch, John Renbourn, Martin Carthy ou John Martyn seraient sans doute restés de braves gardiens du temple folk.
Né en 1940 d’un père écossais et d’une mère guyanaise, Graham a très tôt développé une sensibilité ouverte, qui s’est manifestée par un goût prononcé pour les voyages. Lorsqu’il commence à se produire dans le circuit folk, il a déjà parcouru le globe en long et en large, du Maroc à la Grèce, de la Turquie à l’Inde. Quand la plupart des gamins de son âge ont les oreilles tournées vers l’Ouest, Davy Graham, lui, fixe alors son attention sur les musiques orientales, qui enrichiront considérablement son langage musical et le conduiront notamment à inventer une nouvelle forme d’accordage, bientôt adoptée par tous les guitaristes de sa génération.
A peine âgé de 20 ans, Graham embrasse déjà les deux plus beaux métiers du monde : il est à la fois un découvreur et un passeur. L’instrumental Angi, qu’il enregistre en 1962, devient le sésame de toute une parentèle d’adeptes du fingerpicking en quête de sensations inédites. Dans les albums qu’il enregistre entre 1965 et 1970, et qui font aujourd’hui l’objet d’inestimables rééditions, il enfile la panoplie d’un génial passe-muraille, capable de relier le folk britannique et la musique indienne, le blues le plus rugueux et les mélodies léchées des songwriters de Broadway, l’écriture savante de Lennie Tristano et l’énergie brute du rock’n’roll, Henry Purcell et les Beatles, Lalo Schifrin et Herbie Hancock.
Pour décrire la lumière qu’il a soudain projetée dans les consciences de ses contemporains, le musicien John Pilgrim aura cette formule : “Davy a apporté des réponses à des questions que nous ne nous étions jamais posées.” Davy Graham est de la trempe d’un Django Reinhardt ou d’un Baden Powell. Comme eux, il n’a pas seulement révolutionné l’approche de son instrument et rafraîchi les vieilles façades de la tradition : il a inventé une autre façon de penser la musique, érudite et délivrée de toute contrainte.
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Egalement disponible : le nouvel album Broken Biscuits
www.daveygraham. moonfruit.com
www.myspace.com/ davygraham
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