Pour son dix-neuvième album, le groupe d’Anton Newcombe ne bouscule pas les attentes mais se pose en survivant d’une industrie musicale qui lisse à tout va le feu originel du rock’n’roll. Salvateur.
Il y a probablement peu de gens qui auraient donné cher de la peau d’Anton Newcombe et de ses goules hippies au milieu des années 1990 quand Brian Jonestown Massacre commençait à diffuser une odeur de soufre et de patchouli sur les scènes alternatives. Mouton noir devenu parrain d’une scène néo-psychédélique qui ne cesse de se réinventer, le turbulent américain, dont les frasques sont passées à la postérité via le documentaire culte Dig (2004), s’est mis au vert plus discrètement qu’on ne l’aurait pensé. Il a fait ainsi preuve d’une productivité impressionnante et continue, nous épargnant au passage les récits de rehab ou de crise mystique qu’on aurait pu attendre d’un personnage façonné dans la glaise de ses idoles 60’s et 70’s.
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Le feu ne pousse pas sur les arbres, il brûle dans la poitrine de l’homme aux rouflaquettes grisonnantes. Et ce dix-neuvième album composé avec un backing-band tout neuf en est la plus belle des preuves. The Real ouvre l’album avec une morgue qui semble regarder dans les yeux ses descendants plus ou moins directs, Ty Segall et King Gizzard en tête. S’enchaîne au cordeau Ineffable Mindfuck et ses allures de Ziggy Stardust noirci comme le dos des cuillères qui jonchaient jadis le studio de Newcombe. Le spatial What’s In The Name ou Silenced nous invitent à chasser le dragon de nouveau comme si le monde s’était arrêté en 1969. C’est quand il renoue avec la trip music qui a fait son succès qu’on a le plus de plaisir à retrouver le gourou électrique. Longtemps taxé de passéiste ingérable, Anton Newcombe semble enfin aligné avec une époque droguée à la nostalgie et en manque d’idoles droites dans leurs bottes.
Fire Doesn’t Grow On Trees (A Recordings/Kuroneko). Sortie le 24 juin.
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