Petit frère des Eurockéennes de Belfort étiré dans tout l’Est, le festival TGV Generiq dépayse la musique en la plaçant au coeur de lieux insolites : retour sur un évènement passionnant.
Mulhouse, mardi 6 décembre, 18 heures. Pour le sixième jour de sa cinquième édition, le festival TGV Generiq s’invite dans l’imposante architecture néogothique du temple Saint-Etienne. A l’intérieur, au milieu de ses musiciens, Connan Mockasin promène son allure débonnaire au ralenti. Entre larsens prémédités et sifflements parasites, la douce révélation psychédélique de l’année ajuste les dernières vibrations du concert à venir. L’écho d’une dernière note retenue par l’acoustique baroque du temple n’a pas fini de résonner que les premiers spectateurs investissent les bancs et les travées. Connan a tout juste eu le temps de s’éclipser dans les loges improvisées derrière l’estrade. Le temps d’enfiler une longue tunique noire et bleue et de réapparaître plus lunaire que jamais devant un public interloqué. Le concert débute et les caresses se succèdent dans l’ordre de l’album.
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On en redemande, mais il est déjà temps de filer à l’anglaise pour rejoindre Belfort et Baxter Dury. Sa voix grave et sa pop gonflée à l’humour britannique nous accueillent au domicile de Jean-Paul Roland, directeur des Eurockéennes et admirateur nostalgique de Ian Dury. Le père de Baxter, disparu en 2000, semble avoir légué à son fils bien plus que l’héritage de la célèbre maxime “Sex & drugs & rock’n’roll”. Verre de rouge à la main, le chanteur enchaîne les moments de grâce et les drôleries de dandy, jusqu’à nous faire regretter un départ précipité vers Ronchamp, où Yael Naim doit se produire dans un cadre inattendu.
Imaginée par Le Corbusier au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la chapelle Notre-Dame-du-Haut accueille le deuxième concert de musique “profane” de son histoire. Après Moriarty en 2010, c’est donc à Yael Naim qu’incombe la difficile tâche de réchauffer un public congelé par le souffle venu des contreforts des Vosges. Mission accomplie en mitaines et dans la douleur, au terme d’un concert propret, alourdi d’anecdotes de vie loin d’être indispensables.
Le lendemain midi, entre Belfort et Montbéliard, c’est dans le wagon-bar du nouveau TGV Rhin-Rhône que Generiq poursuit son itinérance. A trois jours de son lancement officiel, la nouvelle ligne à grande vitesse s’offre une dernière répétition grandeur nature avec un chef de bord déluré incarné par Piano Chat. Le Tourangeau attend le départ du train pour libérer son tapage farfelu. Guitare électrique, batterie, synthé : Marceau Boré tape sur tout ce qui l’entoure sans épargner le mobilier de la voiture. Les sautes de courant galvanisent ses fantaisies et l’entraînent vers une conclusion idéale : la réinterprétation dépouillée de Et j’entends siffler le train sur un clavier Bontempi.
Le même jour, le festival atteint la Bourgogne et prend ses quartiers à Dijon. La Cité des ducs pourrait bien anoblir les performances de Connan Mockasin (encore lui) et de Cascadeur, programmés au Grand Théâtre dans la soirée. Mais la fin d’après-midi est réservée au Canada, avec deux groupes et deux concerts organisés dans un hôtel particulier. L’Hôtel de Vogüé bourdonne d’abord au son des progressions raffinées de Monogrenade, délicatesse montréalaise qui triomphe par le bruit et l’effleurement, avant de basculer dans l’énergie et le fracas ordonnés par les deux rockeuses de The Pack a.d.
Le soir venu, Connan Mockasin, maître des songes et de l’apaisement, confirme le ravissement pressenti la veille et ouvre une voie royale à Cascadeur. Accompagnée de dix-huit musiciens, dont quatorze élèves des conservatoires de Belfort et du Jura suisse, la prestation du Messin renvoie aux origines de sa formation classique. Dissimulé derrière son casque de pilote, le chanteur apparaît malgré tout à découvert ce soir-là, comme mis à nu par le renfort de cet orchestre – le Cascadeur Orchestra, réuni spécialement pour l’occasion. Un retour aux sources permis par l’apport de musiciens amateurs : la vraie cascade de l’édition 2011 du festival.
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