Pour le festival Generiq, l’Angleterre qui aime les guitares à envoyé deux de ses deux plus excitants nouveaux venus, Shame et HMLTD. Vus à Dijon.
Pour cette quatrième journée du festival Generiq, on a hésité : tambouille anglaise ou fusion food ? Peu doué pour l’ubiquité, on quitte à regret Audincourt, son Moloco, son absinthe maison et sa programmation mondiale et passionnante. Car ce soir le club présente aussi bien la house parisienne de Paradis, la pop ligérienne de Mesparrow, les joyaux australiens d’Alex Cameron ou l’électronique panoramique des Américains de Survive, responsable de la remarquable BO de la série Stranger Things.
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À ce festin, on préférera pourtant l’assiette anglaise. Qui démarre en toute logique par une entrée américaine au Cellier de Clairvaux avec deux frangins de Floride repérés aux côtés du grand Mac DeMarco : Tonstartssbandht. Le blondin en front de scène tient sa guitare comme une hache, chantant des incantations obscures à une déesse sans doute véhiculée en licorne. À moins qu’il ne raconte une forêt enchantée où pousseraient comme du chiendent des champignons magiques. En tout cas, on en mesure les possibles effets secondaires sur une musique sans forme, sans structure, jouée sur une guitare douze cordes, parce que vingt-quatre cordes, ça n’existe pas. Après ce concert de prog-rock carabiné, on rejoint la colonie anglaise installée dans les caves du centre d’art contemporain du Consortium.
Ça commence dans cet étrange mélange de raideur et de félinité propre aux Savages, qui ont délégué leur bassiste Ayse Hassan et son duo privé, Kite Base. Joli concert aux reliefs un peu absents, délavés, il ne faudra pas grand chose pour que ces chansons lyriques jusqu’au hululement (à ne pas confondre avec hurlement, quoique) trouvent un ton percutant et punchy. En tout cas, cette formule rigoureuse à deux basses et boîte à rythmes est déjà un régal,
Dijon a l’accent londonien
Mais Dijon parle surtout ce soir avec un accent londonien mâle et énervé, plus précisément sud-londonien, avec deux des plus brillants espoirs de la scène locale et électrique : les teignes politiques de Shame et les dandys déglingos de HMLTD. Mais si les deux groupes partagent la même volonté de maltraiter l’électricité et d’exploser les coutures de la pop (Shame) ou du glam-rock (HMLTD), les musiciens, amis dans la vie, parviennent à leurs fins par des voies radicalement différentes. Shame s’inscrit dans une veine terriblement british de pop journalistique, racontant la petite vie anglaise à hauteur d’homme. Ils évoquent ainsi la morgue de The Fall, l’urgence de Joy Division, la rage de Clash, le bagout de The Streets ou l’élégance des Smiths.Car derrière les facéties, les discours rageurs et les shows tapageurs de leur chanteur Charlie, grosse star, le groupe joue précis, fougueux, érudit, à la fois punk dans l’esprit et pop dans la lettre.
Chez HMLTD, la notion de filiation est nettement moins évidente, tant ce groupe aux nationalités éparpillées (deux Anglais, trois Français, un Grec) semble échapper à tout arbre de famille – ou alors, un arbre tordu, déchiqueté par la foudre. On y reconnaît peut-être l’esprit tapageur des New York Dolls, la classe lugubre des Cramps ou les cris de crooners maudits, d’Iggy Pop ou Nick Cave. Mais on n’y entend à l’arrivée rien de tout ça, tant le son du groupe, chien fou sans collier, échappe à tout contrôle, toute raison. C’est fascinant à voir autant qu’à entendre, en quelques flashs colorés et déflagrations soniques venues tout droit des hormones encore en lutte dans ces corps efflanqués. London calling ? Pour ces deux groupes, on répond immédiatement présent.
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