Le festival anglais The Great Escape continue. Petit tour d’horizon de quelques coups de cœur du jour 2
On commence tôt le deuxième jour des festivités avec des Canadiens pour lesquels on se serait de toute façon lever la nuit. Ils s’appellent Nap Eyes et, pour nous faire venir, ont sorti les références qui font guili-guili aux cordes sensibles : Le Velvet, les Modern Lovers ou le psychédélisme psycho-rigide des Neo-Zelandais de The Clean. Beaucoup de références auxquelles on rajoutera les Feelies et leurs disciples contemporains de Parquet Courts, mais qui n’écrasent jamais les chansons véloces et insouciantes des quatre garçons. L’élite des labels anglais est dans la petite salle, joue des coudes pour gigoter sur le ligne de front avec les kids qui ne partagent sans doute pas leurs références mais leur enthousiasme. On va aimer Nap Eyes, pour ces références comme pour leur naïveté, leurs riffs serrés, leurs rythmiques sèches, leur chant qui ne connaît que New York.
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On enchaine avec le surdoué Declan McKenna qui, à 17 ans, maîtrise déjà deux configurations culottées pour ses concerts, suivant les besoins. En grandes pompes, avec un groupe riche de cinq musiciens, alternant électricité, électronique et organique. Ou, comme cet après-midi, en unplugged dans une garden party (avec une caissette en bois en guise de batterie). Mais les chansons se soucient guère de leur décoration, de leur déguisement, suffisamment, insolemment écrites et bichonnées pour tolérer tous ces possibles. Et même à poil, elles affichent leur classe naturelle, leur élégance surannée, leur jovialité contagieuse. Sa voix est tellement supérieure qu’il pourrait reprendre du Jennifer Lopez et on trouverait ça super. D’ailleurs, il reprend du Jennifer Lopez. Et on trouve ça super.
Après ce joli moment de soleil et de candeur, on se plonge dans le psychédélisme agité et lourd des Écossais de Man Of Moon, qui font tomber la neige toxique sur ce petit coin de Brighton, avec leurs longues litanies au ralenti défoncé. Leur krautrock raide du studio se décompose sur scène en un rock livide, ulcéré, qui travaille à l’explosif, à la torture mentale. A côté, leurs compatriotes de Mogwaï sont, soniquement, de biens paisibles folkeux fragiles.
On a raté Bishop, sensation sur la base de seulement deux chansons qui ont fait hurler des gros mots comme Portishead à des professionnels même pas encore ivres. Il faudra voir comment évolue le son de l’Américaine, mais on est déjà certain de la massive évolution, à court terme, de son compte en banque. On a raté Bishop donc, mais on a un mot du docteur : il préconisait, pour remplacer tous les anti-dépresseurs de la terre, de fréquenter fissa les Américains Lewis Del Mar. Et c’est encore mieux : ta femme partie ? Ta voiture cassée ? Ton président de la République tout mou ? Consulte d’urgence Lewis Del Mar et tu iras bien. Tout ici invite à la jubilation, de ce chant espiègle à la Beck à ces mélodies intenables. Et que dire de ces rythmiques invraisemblables, qui réussissent cet exploit notoire : faire dodeliner furieusement une salle entière de professionnels. Une histoire d’amour a sans doute démarré.
JD Beauvallet
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