Leur fascination commune pour le romantisme et l’imaginaire berlinois, leur manière identique de gérer à mi-temps la carrière de leurs groupes respectifs et la place privilégiée qu’ils occupent tous deux dans l’univers sonore de Wim Wenders ont fait de Nick Cave et Simon Bonney deux voisins de palier. Ce rapprochement hâtif, admis par habitude, a […]
Leur fascination commune pour le romantisme et l’imaginaire berlinois, leur manière identique de gérer à mi-temps la carrière de leurs groupes respectifs et la place privilégiée qu’ils occupent tous deux dans l’univers sonore de Wim Wenders ont fait de Nick Cave et Simon Bonney deux voisins de palier. Ce rapprochement hâtif, admis par habitude, a fini par refuser l’idée que ces deux bonshommes proposent deux lectures radicalement différentes du même monde. Si Nick Cave se nourrit du chaos, explore avec les Bad Seeds la pulsion dans un romantisme sanguinolent et terrasse par sa violence, le Crime & The City Solution de Simon Bonney lui préfère le désordre léger et un univers musical moins enchevêtré, détaché des passions. On aimera leurs carrières solo pour les mêmes raisons. D’un côté, celle d’un Nick Cave jusqu’au-boutiste, assoiffé chronique d’expériences au point de s’installer au Sud dans la pétaudière de São Paulo, toujours prêt à plonger en apnée dans le musée du blues pour revisiter l’Amérique de Presley, Leonard Cohen, Tom Jones, Tim Rose, Dylan et Roy Orbison. Autant d’âmes qui hantent encore le violacé de son Murder ballads toxique, vampé de féminin, multipliant les visites des alcôves macabres et transpirant de rage. De l’autre, le carnet de route contemplatif d’un Simon Bonney désincarné (I’m everyman littéralement « Je suis Monsieur-tout-le-monde »), ascétique, qui plante naïvement son désir d’Amérique au cœur de chacun de ses albums solo. Comme son Forever de 1993, Everyman a la force de ces road-movies immobiles tant prisés par Wenders. Son chant, jamais très loin de celui de Lloyd Cole, émeut sans accabler, goûte le poison lent de l’abandon (Western lights), sillonne avec son baluchon mélancolique des terres nord-américaines arides, rustiques mais clémentes. Fuyant les reprises comme on déteste les cartes postales seul le Blue eyes crying in the rain de Fred Rose fait ici l’objet d’une reprise , ses chansons y rencontrent les légendes du rock américain : Johnny Cash (A White suit in Memphis) ou Elvis (Travelin’on) et scénarisent un western sans mémoire ni racines, terriblement modeste et attachant.
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