Virtuose de la clarinette basse, Denis Colin propose une musique sereine et aventureuse. Il y a quelque chose d’exemplaire dans le cheminement personnel du clarinettiste basse Denis Colin vers toujours plus d’indépendance et de cohérence esthétique une progressive émancipation artistique que l’on pourrait résumer en trois étapes essentielles. Les années d’apprentissage d’abord : nourri, […]
Virtuose de la clarinette basse, Denis Colin propose une musique sereine et aventureuse.
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Il y a quelque chose d’exemplaire dans le cheminement personnel du clarinettiste basse Denis Colin vers toujours plus d’indépendance et de cohérence esthétique une progressive émancipation artistique que l’on pourrait résumer en trois étapes essentielles. Les années d’apprentissage d’abord : nourri, adolescent, au blues colérique d’Hendrix et aux divagations free-rock de Soft Machine, c’est avec la découverte du free-jazz qu’il décide de sa vocation de musicien. Il entre au Conservatoire et fréquente les musiciens free de la capitale Frank Wright et surtout Alan Silva, contrebassiste historique (compagnon de Sun Ra, Cecil Taylor, Albert Ayler…), qui l’intègre bientôt à son grand orchestre, le Celestrial Communication Orchestra. Il y restera huit ans, jusqu’au milieu des années 80. Deuxième temps : le tournant des années 90. Un disque au titre laconique et programmatique : Clarinette basse seul. Après des années d’aventures collectives et libertaires, la nécessité vitale de faire le point en passant par l’épreuve ascétique et initiatique du solo absolu, comme un rite de passage vers de nouveaux mondes, d’autres façons de faire de la musique. Ces exigences prendront la forme d’un trio troisième époque avec Pablo Cueco aux percussions et Didier Petit au violoncelle : une musique forte et fragile à la fois, d’un extrême raffinement dans sa façon d’agencer l’improvisation à des cadres formels mouvants, de jouer sur la précision de la ligne et la lisibilité des plans, sans rien sacrifier à l’idée de composition instantanée. L’association durera près de dix ans. Et si aujourd’hui Denis Colin retrouve des formules orchestrales plus étoffées, comme son projet Dans les cordes bientôt à l’affiche du festival Banlieues Bleues ou comme ici avec Les Arpenteurs, c’est indéniablement à partir de ces nouvelles orientations longuement élaborées au sein du trio et dorénavant totalement maîtrisées. On trouve là une musique sereine et aventureuse, qui ose une certaine simplicité formelle, le lyrisme et la séduction mélodique, en assumant pleinement sa dimension narrative. Chaque thème est « orienté », fonctionne comme un plan-séquence, très linéaire dans sa progression, sans ellipse une traversée ; mais dans le même temps on sent un souci constant de travailler la « profondeur de champ », de donner à voir/entendre des saynètes subliminales qui fonctionnent comme une sorte d' »épaisseur imaginaire ». Tout le charme réside précisément dans ce passage constant entre une musique légère qui se projette et voyage (on entend des échos assourdis d’un Orient lointain et fantasmatique) et simultanément se retourne sur ses pas et scrute attentivement la matière de ses rêves.
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