SAFIA BAHMED-SCHWARTZ se définit comme “un mélange de Booba et Mylène Farmer”. Avec son nouvel ep, l’été sera sombre, érotique et dansant.
Safia Bahmed-Schwartz peut être difficile à cerner, et parfois même à apprécier. Dessinatrice, écrivaine et plasticienne (entre autres), la chanteuse vient de sortir le deuxième volet d’une série d’ep consacrés aux quatre saisons. Un projet assez ambitieux et qu’elle explique ainsi : “En fait, il y a cet adage populaire, ‘il n’y a plus de saisons’, qui prend tout son sens avec le réchauffement climatique. Regarde, là on est presque en été et il fait froid à Paris. C’est n’importe quoi… Bref, j’aimais beaucoup l’idée de confronter cette expression à la tradition qu’on trouve dans la musique classique, celle d’illustrer les saisons par des pièces musicales.”
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
L’été sera sombre
Et après le printemps, voici donc Eté (Artcore). On l’aura compris : le sous-titre est un jeu de mot entre atroce et hardcore. Le programme n’annonce ainsi pas vraiment grand-chose de bon pour la saison préférée des vacanciers, voire de la plupart des gens normaux. Et en effet, tout au long des six titres qui constituent l’objet musical en question, on trouve peu de célébrations du soleil et de la plage. A l’exception peut-être de la chanson d’ouverture, Summerhit, petit tube d’eurodance qui fleure bon les années 2000. Chanté en duo avec Timothée Joly (sûrement l’une des plus belles voix du rap underground français, au passage), le morceau donne envie de se prélasser nu sur la plage. Pour le reste, on se retrouve plutôt à traverser des boulevards moites et frémissants, un cran d’arrêt caché dans la boîte à gants d’une berline noire.
On passe ainsi d’une ode à la dépendance sur fond de kicks gabber (Danse sur moi) à un cauchemar sensuel (Fête foraine), en passant par une marche nocturne aux poings serrés (200). Et tout semble se fondre dans un étrange alliage, entre l’érotisme de la voix, la froideur mécanique de l’auto-tune quasi chuchoté, et l’ombre qui traîne derrière chacun des mots prononcés par la chanteuse.
“un mélange de Booba et Mylène Farmer”
Eté (Artcore) a quelque chose de très perturbant, qui ne lâche pas son auditeur et le pousse à cliquer à nouveau sur le bouton play. On comprend aisément la fascination que Safia Bahmed-Scwhartz entretient pour les concepts d’addiction et de dépendance. Sa musique elle-même agit de la même manière que les drogues dures ou les amours-poison : elle rebute parfois, fait un peu mal, mais contient quelque chose qui pousse à s’y replonger. Un truc qu’on ne saurait pas trop décrire, mais qui trouble et magnétise l’attention.
En tout cas, ce n’est pas pour rien que des musiciens aussi talentueux que Paul Seul, Jorrdee ou Timothée Joly collaborent avec elle depuis un moment. Et même si on est très contents d’apprendre qu’un feat avec Triplego est prévu pour le prochain ep, cantonner Safia Bahmed-Schwartz à ses featurings serait assez réducteur. On a simplement hâte que celle qui se décrit comme “un mélange de Booba et Mylène Farmer” (on sent d’avance quelques mâchoires se serrer) dévoile ses futurs projets, et sa vision des deux saisons les plus froides de l’année.
Eté (Artcore) (autoproduit)
{"type":"Banniere-Basse"}