Qu’ont donc en commun Arlequin, Tarô-Kaja et le roi Singe de l’Opéra de Pékin ? C’est toute la problématique de Monnaie de singes de Didier Galas, qui, à travers la rencontre de trois personnages venus d’orient et d’occident, compose une fable sur la nature humaine.
Au terme de quelques années passées au sein de la Comédie de Reims où il joue le cycle Ahmed de Alain Badiou et Christian Schiaretti, Didier Galas est parti étudier le Nô à Kyoto, dans le cadre de la Villa Kujoyama de l’AFAA (Association Française d’Action Artistique) en 1998. En 1999, il monte son adaptation de Don Quichotte de Cervantès au Venezuela et joue dans Fariboles de François Rabelais, adapté par François Rabelais et mis en scène par Charles Tordjman.
Monnaie de Singes aura nécessité trois périodes de travail : à l’Opéra de Pékin en automne 99, aux Laboratoires d’Aubervilliers au printemps et à l’été 2000. La rencontre entre Didier Galas, Kaoru Matsumoto, acteur de kyogen et de nô dans la famille Shigeyama de Kyoto, et Zhihua Dong, acteur de l’Opéra de Pékin, est le ressort principal de ce projet. Il s’articule autour de la rencontre de trois personnages similaires, bien qu’issus de cultures différentes : Arlequin dans la Comedia dell’Arte, Sun Wukong, Le Roi Singe de l’Opéra de Pékin et le valet Taro-Kaja dans les farces (kyogen) qui accompagnent le nô. Entretien.
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Est-ce un Arlequin de ton invention ou est-il fidèle à la tradition ?
Les premières traces de la Comedia dell’Arte datent du XVIè siècle et le premier contrat retrouvé mentionnant le métier de comédien, ce qui est la définition même de Comedia dell’Arte, date de 1545. Je me suis appuyé sur deux textes : un récit édité en 1585 par Didier Millot imprimeur, Faicts et dicts du Seigneur Arlequin (écrit à la manière du Tiers Livre des Faicts et Dicts héroïques du bon Pantagruel, de François Rabelais) et Scénario de Dominique Biancollelli, acteur à la Comédie Italienne de l’Hôtel de Bourgogne. Il y décrit tout ce qu’il faisait en scène avec ses camarades, Scaramouche, Polichinelle, Colombine et toute la bande. Je me suis aperçu que son Arlequin n’est pas un gros bêta comme celui de Goldoni. Ce qui est beau avec lui, c’est qu’il est maître d’un jeu et possède quelque chose qu’on n’explique pas, comme ce bout de corne sur son masque, qui a à voir avec le diable.
Comment opère la rencontre avec les deux autres personnages ?
Par le jeu. C’est aussi bête que quand tu es gamin et que tu imagines la rencontre de Tintin et de Batman. Normalement, ils n’ont rien à faire ensemble mais on adore ces personnages et on a envie qu’ils se croisent. Ce sont trois grands rusés qui arrivent en scène avec leurs racines, leurs traditions, leur art, leurs costumes traditionnels et leur personnage dans toute sa superbe. Mais le dispositif réalisé par Daniel Jeanneteau (scénographe de Claude Régy) est très simple : c’est une toile, comme une tente à l’envers ou un drap sous lequel l’enfant s’invente des territoires.
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