Entre classicisme sixties et expérimentations, Tim Presley aka White Fence signe son disque le plus personnel et, dans un élan d’optimisme, souligne les vertus salvatrices de la musique.
Il y a différentes manières de rejoindre San Francisco depuis Los Angeles par la route. Soit opter pour l’efficacité de l’Interstate 5 ou de la Highway 101, ou préférer l’atmosphère enchanteresse de la Pacific Coast Highway et se laisser porter par ses courbes avec nostalgie. Tim Presley serait plutôt du genre à choisir cette deuxième option. Du moins, elle reflète la musique qu’il produit depuis un bon moment : des élans garage sixties mêlés aux sonorités Byrds et Kinks, présents sur ses disques d’appellation White Fence ; des passages déstructurés et expérimentaux, en collaboration avec la Galloise Cate Le Bon sous l’étiquette DRINKS ou sous son propre nom (The Wink en 2016) ; le tout imprégné d’une fantaisie psyché.
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Album de la maturité
I Have to Feed Larry’s Hawk, dernier (double) album solo en trois ans, refuse de choisir parmi ces identités afin de mieux les fusionner. Pour ça, Tim Presley a dû regagner San Francisco.
“J’ai passé onze ans à L.A., mais il fallait que je m’éloigne de toutes ces tentations et de cette vie vraiment bizarre, explique-t-il au téléphone. Cet album est donc très lié à San Francisco. Comme avec un journal intime, c’est surtout un disque qui me permet de mettre en perspective certaines choses de ma vie. J’ai vieilli et je peux maintenant regarder en arrière de façon réfléchie.”
Tim serait-il en train de nous faire le coup de l’album de la maturité ? Sans doute. Mais heureusement ici, la formulation est loin d’être synonyme d’ennui et la flamboyance nonchalante de White Fence reste intacte sur des titres comme Neighborhood Light ou le barjot Forever Chained. Fait surprenant, l’album a été entièrement composé sur un piano, dans le nord de l’Angleterre, ce qui lui confère une coloration inédite.
« Mélancolique tout en étant optimiste »
En prenant du recul sur ses addictions et ses années tourmentées, Tim élabore de fascinantes compositions, parfois dépouillées, souvent baroques, à l’émotion palpable (les sublimes Phone, I Can See You et Indisposed). “Sur les anciens disques de White Fence, j’étais complétement déconnecté, enfermé da ns un imaginaire. C’était peut-être bien pour ma créativité, moins pour ma santé mentale. Là, cet album est certainement le plus personnel que j’ai fait. Il est mélancolique tout en étant optimiste.” Cet optimisme prend tout son sens lorsque sont abordés Harm Reduction A et B, deux morceaux instrumentaux, construits autour d’une boucle de synthé modulaire, et qui pourraient former à eux seuls un disque aux allures de drone ambiant. Hors sujet à la première écoute, ils se révèlent nécessaires.
“Ces morceaux se devaient d’en être. Il s’est passé tellement de choses dans ma tête, tellement de pensées bizarres, entre culpabilité, amour, tristesse, recherche du bonheur… J’avais besoin d’une musique répétitive qui puisse me mettre dans un état méditatif, qui me calme. C’est comme être coincé dans une boucle hypnotisante mais optimiste. Et ça m’a été utile.” Utile en tout point pour clore un disque brillant.
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