La terreur de l’Amérique s’est installée au Palais Omnisports de Bercy jeudi 19 juin avec grand son cirque hip-hop. L’Eminem Show porte bien son nom.
Jeudi 19 juin, aux alentours de 16h, un bureau de la rue de Rivoli, Paris 1er. JDB s’arrête devant la pile de VHS qui menace tous les jours un peu plus de s’écrouler pour me faire une proposition. Brocante à Chinon ? Week-end à Brighton ? Partie de pêche sur le Cher ? Point du tout, billet pour le concert du soir même à Bercy d’Eminem ! Dans cette journée de bureau un peu morose, mes résolutions du jour ? soirée cool pour oublier la déception des Libertines de la veille et préparation du réfrigérateur en vue de France / Japon – sont vite remisées au placard pour accepter sans condition cette nouvelle aventure humaine. Et aussi tant pis pour Babe qui va encore être furieuse de ne pas me voir au concert de Themselves (« Anticon, une autre conception du hip-hop » pourrait dire la pub) à la Fondation Cartier.
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21h, je débarque à Bercy en pensant avoir tout loupé des premières parties mais non ! Bonne surprise, le Californien Xzibit occupe encore la scène. Du haut des gradins, Bercy plongé dans le noir et transformé en temple gangsta-rap impressionne par son gigantisme. Eternel mais honnête second couteau de la catégorie, Xzibit sait y faire pour réussir la mission qui lui a été confiée : commencer tout doucement à chauffer un public qui attend son idole. Une petite intro à la Dr. Dre et hop, la foule part au quart de tour.
Les lumières se rallument et Bercy apparaît. Merci aux techniciens d’éteindre ça tout de suite. Quelques minutes plus tard, c’est au tour d’un autre gang de Californiens de prendre la scène d’assaut. Cypress Hill débarque sur une scène derrière laquelle trône un chien géant (?) coiffé d’une couronne. Un gars aux platines (pas Muggs apparemment mais la visibilité réduite empêchera d’en savoir plus), Eric Bobo aux percussions et à la batterie, et un B-Real en pleine forme commenceront leur concert par les titres les plus récents qui sentent bon le goth et le fricotage avec le métal.
Arrive le grand moment du show. B-Real s’allume un joint qui, sur les grands écrans de Bercy, affiche à peu près le diamètre du sens interdit qui orne la couve des Inrocks de cette semaine. Fais tourner gars, y’en a à peu près pour chaque spectateur de Bercy ! Tout ça pour un enchaînement facile avec un bon petit I Wanna Get High de derrière les fagots. Suivra une jolie brochette de vieux classiques qui nous rappelleront que c’était il y a dix ans déjà, même si la seule vue de nos presque-quadras trahissait déjà le temps qui passe : How I Could Just Kill A Man, When The Shit Goes Down, Insane in the Brain? B-Real invitera Eric Bobo à une jolie démonstration de ce qu’est la drum’n’bass jouée à deux mains sur des percus. Rigolo. Le tout se clôturant sur un Rap Superstar à vous donner des regrets éternels : si Cypress Hill jouait avec une basse et une guitare, ce serait peut-être le meilleur groupe de rock du monde.
22h et des poussières. La lumière s’éteint et apparaîssent les lueurs de l’Eminem Show, cet intitulé dominant la scène façon lettres de cirque. Les écrans se mettent à cracher des images de télés américaines, vaste collage de bouts de phrases de présentateurs et de politiciens américains évoquant Eminem. Le rideau s’ouvre sur la scène et le blondinet descend tout doucement de la grande roue qui tourne au milieu de son cirque. White America !! Evanouissement des premiers rangs à très forte proportion féminine comme en témoignent les images projetées à l’écran.
Succession de tubes, passage en revue de quelques moments qui font peur (?) à l’Amérique de Bush, Eminem assurera le spectacle deux heures durant, tenant un public à bout de bras (tatoués) avec seulement trois albums et demi : Kill You, Cleanin Out My Closet, The Way I Am, I’m Back . Assise juste devant moi, Sophie est très sympa, il faut dire qu’elle travaille à la télévision française. Mais à partir de Without Me, elle se lève pour danser avec ses copines et réduira fortement mon champ de vision. Pas grave, le spectacle se limite finalement à pas grand-chose : tout juste les décors de cirque font-ils parfois entrevoir en fin de chanson des mini-feux d’artifice qui pétaradent comme un vieux scooter, Eminem shootera un type (Moby cette fois aussi ?) monté tout en haut du décor, qui retombera s’écraser comme une grosse patate trop cuite etc’
Le spectacle est autant du côté de ses invités qui connaîtront tous leur quart d’heure de gloire : D-12, Obie Trice et surtout 50 Cent, le sympathique rappeur new-yorkais qui jettera à un public en folie un peu tout ce qu’il a sous la main : sa casquette, ses quatre tee-shirts superposés, sa chaîne en or, sa serviette.. pour finir torse nu et offrir de puissants Wanksta et In Da Club, autant plébiscités que les tubes du blondin. Il faut dire que largement aidé par son physique et son charisme, 50 Cent occupe plutôt bien la scène.
Une fois chacun de ces petits intermèdes terminé, Eminem revient prendre en main le cours de son Show, provoquant une levée de briquets sur Stan (Dido reprise en chœur autant qu’en c’ur par le public de Bercy), une bouffée d’émotion signée 8 Mile sur Lose Yourself, un vent de folie rock sur Sing For The Moment
Merci au grand cirque du hip-hop américain même si on regrettera une nouvelle fois (la dernière c’était Jay-Z au Zénith) le pilotage automatique de la musique qui tourne derrière. Ah, les Roots… Ah, Common… Un Eminem Show mais pas vraiment d’Eminem chaud. Un son fort certes, mais on ne parlera pas pour autant de gros son. Et dommage qu’il n’y ait aucune place laissée à l’improvisation, à un soupçon de vie musicale. Peut-être, rien que pour cela aurait-il fallu choisir Themselves à la Fondation Cartier ?
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