Un récit que le groupe de Manchester, et trésor national anglais, poursuit avec majesté.
Directement catapulté numéro 1 des ventes d’albums au Royaume-Uni la semaine de sa sortie, Little Fictions est la septième merveille signée Elbow, dont le reste du monde semble ignorer jusqu’à l’existence. Curieux hiatus pour un groupe qui ne transpire en rien la morgue anglocentriste, possède certains des arguments qui ont fait de Coldplay un mastodonte planétaire et qui bâtit, au contraire de ces derniers, une œuvre opulente dénuée de toute cosmétique démago.
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Après une pause de trois ans et une incartade solo de leur leader Guy Garvey en 2015 (le très beau Courting the Squall), Elbow reprend donc ses marques sans envie de les brutaliser, comme si ce groupe étanche à toute forme de violence extérieure n’avait pour méridien que lui-même, et sa quêtede beauté pour seul gouvernail. D’entrée, le bien nommé Magnificent (She Says) coupe le souffle, la voix de Garvey rivalisant en altitude avec des cordes hollywoodiennes sur une rythmique de croisière timidement funky.
L’alchimie Elbow ne s’est jamais émoussée depuis quinze ans, elle a même gagné au fil des conquêtes une majesté terriblement et irrésistiblement anglaise, celle des premiers Genesis, de Robert Wyatt, celle de Talk Talk, voire de XTC, qui repose souvent sur un mélange d »hypnose et d’émerveillement, sur une certaine sagesse protestante non rétive à de soudaines explosions émotionnelles.
Un flirt à l’ancienne contre Tinder
Comme ses six prédécesseurs, tous passionnants mais pas toujours aussi généreux, Little Fictions déploie lentement ses arômes, préférant l’envoûtement au coup de foudre, la drague à l’ancienne plutôt que Tinder. À l’inverse d’un Radiohead qui a complexifié à outrance son message et brouillé ses pistes au point de devenir parfois impénétrable, Elbow continue de faire de la fluidité (instrumentale, mélodique, littéraire) son alliée précieuse pour ne pas virer à la mascarade progressive.
Même la chanson-titre Little Fictions, qui s’étire sur plus de huit minutes, ne donne jamais dans l’esbroufe boursouflée mais joue plutôt sur des variations de teintes subtiles, comme l’album dans son ensemble prend au fil des écoutes la dimension d’une fresque humaniste aux reflets inépuisables.
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