Electro, funk, disco, fou, aventureux, doux, classieux, burné : le premier album de Todd Terje dilue les plaisirs et les expériences. « It’s Album Time » sortira le 7 avril. On l’a écouté deux mois avant sa sortie : tuerie.
Habitué des remixes et des productions pour d’autres artistes (de Franz Ferdinand à Robbie Williams quand même…), Terje Olsen, aka Todd Terje, sortira son premier album le 7 avril prochain. L’objet s’intitule sobrement It’s Album Time et il est arrivé en version digitale lundi matin, bien calé entre deux mails classiques de début de semaine. La première écoute émerveille. Les suivantes forcent l’admiration et l’addiction.
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Pour être clair, les douze morceaux de la première collection du Norvégien défoncent assez proprement tout ce qu’il m’a été donné d’écouter depuis le début de l’année. Impossible dans ces conditions de résister au plaisir (forcément coupable) d’amplifier les attentes et les frustrations qui tournent autour d’un album essentiel avant sa sortie. Ok, la tracklist dévoilée fin janvier promettait déjà quelques grandeurs avec la présence de son tube de 2012 Inspector Norse (dernier titre de l’album) et celle, plus surprenante, de Bryan Ferry sur une reprise du classique Johnny & Mary de Robert Palmer. Mais les dix morceaux fous qui accompagnent les courbes de ces belles révérences offrent finalement la plus agréable stupeur discographique de l’année à peine entamée.
« It’s Album Time, It’s Album Time, It’s Album Time, It’s Album Time, It’s Album Time, It’s Album Time… » L’intro dure un peu moins de deux minutes. Assez de temps pour que Terje construise un beat hypnotique et scande en une quinzaine de murmures ce que le titre de l’album laissait entendre au mois habile des déducteurs. L’heure de l’album a sonné, Todd Terje compte bien s’en délecter pendant les 55 minutes qui suivent ce premier sommet. Leisure Suit Preben et Preben Goes To Acapulco ouvrent ensuite la porte des années soixante-dix pour révéler une vue infinie sur une mer de claviers vintage. On se croirait presque dans Moog Indigo, l’album précurseur rêvé par Jean-Jacques Perrey il y a 44 ans.
Relier les genres et les générations, c’est là tout l’intérêt, toute la science de ce premier album de Todd Terje. Avec It’s Album Time, le producteur norvégien s’autorise mille aventures et un parcours érudit, jalonné d’enchaînements souvent contradictoires mais toujours précis. Étiré entre les influences de Chico Buarque et Slagsmålsklubben (!), un morceau comme Svensk Saas ose ainsi confronter le beat-box et le piano. le Brésil et la Scandinavie, la samba et l’électro, pour accoucher d’un délire d’expériences hybride et maîtrisé. En milieu d’album, Strandbar propose une vision minimaliste et presque acoustique de la house de Chicago avant la grosse claque Deloran Dynamite où Terje roule à grande vitesse sur les terres (et sur la tête) de Kavinsky. Nile Rodgers valide la progression à partir de 3 minutes 25.
Sur la piste sept, l’album devient vocal le temps d’une reprise, Bryan Ferry invitant sa voix et sa nostalgie sur Johnny & Mary, le hit glacé soufflé par Robert Palmer en 1980. Pause de BPM avant la longue montée qui conduit vers la fin d’album dominée par Swing Star, danse de nuit en deux actes où des souvenirs de Daft Punk époque Homework croisent la classe et le sens du panache d’Isaac Hayes. Terje porte d’ailleurs mieux la moustache que le casque et Oh Joy, l’avant-dernier morceau, vient logiquement draguer les fans d’italo disco et de Giorgio Moroder.
Si vous êtes arrivés jusqu’à ce paragraphe vous connaissez sans doute par cœur les vibrations du dernier titre de l’album. Pour en découvrir l’intégralité, il faudra patienter jusqu’au 7 avril avec la sortie de It’s Album Time. Un disque qui confère à l’électro de 2014 ce que Jagwar Ma avait offert au rock de 2013 : un point de basculement jubilatoire où le présent ravive le passé en abolissant les frontières, sans fausse pudeur, à l’abri des complexes. La plus belle aventure écoutée cette année.
album : Todd Terje – It’s Album Time (Olsen Records / Kobalt / [Pias])
concerts : 11 Avril – Paris, Palais de Tokyo // 12 Avril – Lyon, Le Sucre
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