Du Québec d’Australie, de France, d’Angleterre, du Chili, d’Amérique ou d’Allemagne, ces personnalités mériteront d’être suivies dans les mois à venir. Porquoi? Parce que leurs musiques ont brûlé leurs papiers, déchiré leurs cartes de memebres et gravement insulté les orthodoxes.
– ZIMPALA
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
« L’image du DJ seul derrière ses platines, travaillant uniquement avec des séquences en boucle est un peu datée aujourd’hui. Les DJ ont découvert qu’ils avaient besoin des musiciens, de l’émulation collective pour donner une nouvelle énergie à leur musique. » Le Bordelais BNX sait de quoi il parle. Après des années de travail solitaire derrière ses platines où il mixait avec bonheur électronique, acid-jazz et même quelques bizarreries d’André Popp, il a agrandi son champ de vision, créé son propre label, Fantômas, et mis trois ans pour mûrir le projet Zimpala. Ici, les samples vivent en autosuffisance et la méthode de travail, héritée des principes de la musique électroacoustique, rappele celle des Allemands de Jazzanova, tant dans le procédé que dans le résultat. Loin des tendances funk-house-soul françaises, Zimpala organise avec Almaviva un télescopage électronique fiévreux et jouissif.
Almaviva (Fantômas/Platinum/Discograph).
– TROUBLEMAKERS
Depuis l’engouement britannique pour la french touch, les groupes français n’ont plus besoin de transiter par l’étranger pour réussir à infiltrer leur pays. Les Marseillais de Troublemakers constitueront donc une exception de taille. Repéré et signé par les Américains de Guidance, label de house deep et onctueuse, ce trio offre sans doute à la musique électronique d’ici une direction savoureuse et viable. Leur mixture de funk, hip-hop, soul ou house respire l’air des films de blaxploitation, arpente le bitume new-yorkais, pioche dans une collection de disques nourrie d’imports, d’emprunts. Grâce à Doubts and convictions, leur premier album à paraître l’année prochaine, Marseille va devenir un relais du down-tempo européen, pas loin de Vienne ou Bristol.
Doubts and convictions (Guidance/Pias), sortie en janvier 2001.
– MAGNÉTOPHONE
De ce duo anglais plutôt anonyme on ne connaissait que quelques singles, sortis sur des micro-labels post-rock et un peu brouillons. Pour son premier long ouvrage, offert à 4AD, Magnétophone s’est débarrassé de ses fringues les moins fluides et a laissé passer, dans son studio de fortune, de la souplesse, de la mélodie et des rythmes patraques, nonchalants à souhait. Ici vivent entrelacés des accords primaires et primitifs, joués sur des orgues d’enfants de chœur, et des sonorités troubles et crasseuses. Dans ce magnétophone-là, cohabitent, enfin apaisées, les excroissances industrielles d’Einstürzende Neubauten et les comptines des Beach Boys. J. G.
I guess sometimes I need to be reminded how much you love me (4AD/Labels).
– ALAN BRAXE
Ce type est un phénomène. Après avoir collaboré avec Thomas Bangalter et Benjamin Diamond le temps d’un Stardust anthologique et béni des ondes, Alan Braxe a pris son temps, histoire de ne pas tomber trop rapidement dans le jeu dangereux du business et des carrières avortées. Après s’être fait la main sur des remixes, notamment pour Björk, le Toulousain a préféré fonder sa propre maison, Vulture Music, dont il s’occupe tout seul, en artisan passionné du vinyle. L’unique référence du label, le single Running, est un tube inattendu et mondial, dont les ventes sidèrent les professionnels de la profession. Alan Braxe, pourtant, reste de marbre devant un tel succès : il préfère laisser le temps faire son uvre et se donne six mois pour se consacrer entièrement à sa musique et bâtir, en compagnie d’un comparse musical, l’ossature d’un premier album en devenir. En attendant, les curieux pourront se rabattre sur Intro, réédition en CD du premier single. J. G.
Intro (Vulture Music).
– LAKE SOUL
Si ces deux vétérans de l’activisme électronique rhône-alpin, mieux connus sous les pseudos de Miloch et Alex K, ne sont pas disposés à scier la branche dure de la house sur laquelle les a assis le récent succès d’Autour de toi, troublant single porté par la voix de Mathilde (que l’on retrouvera sur quatre titres de l’album), c’est bien de techno qu’il s’agit ici. Une techno née dans les raves il y a près de dix ans, à qui la fréquentation assidue des clubs a appris à mettre de l’eau dans son vin, du groove dans ses baskets. F. V.
Sans interdit (Sekence/Edel), sortie en février 2001.
– LES JARDINIERS
« J’étais venu en France en 1997, en pleine folie french touch. Cela a forcément influencé notre musique », avoue Martin Dumais, membre des québécois Jardiniers, qui commencèrent à semer leurs graines avec la new-wave. « Pour l’album, on voulait que ça swingue et, en même temps, en dire plus sur nos influences qui vont de l’industriel ou la techno-pop à l’italo-disco. » Cafétéria, premier essai drolatique et dynamique, résume bien l’état d’esprit des trois rigolos.
Cafétéria (Inca/Omnisonus).
– NICOLE WILLIS
Comme chez la grande harpie Peaches, le R&B n’en mène pas large ici : tenaillé entre la voix autoritaire de cette diva-t-en-guerre et les arrangements malsains de son mari Jimi Tenor, il oublie de frimer dans son confort toc, de se tortiller mécaniquement dans une soie douteuse. Surtout que pour tenir les chandelles de ce couple cintré, le légendaire Maurice Fulton est venu assurer les sévices électroniques sur cet album de soul futuriste et traître : derrière le miel, le scalpel.
Soul makeover (Sähkö/Pias).
– SPACEK
Depuis plus d’un an, c’est l’arlésienne la plus frustrante de la dance-music britannique : dans quel espace s’est perdu Spacek ? Un album, attendu depuis le phénoménal single Eve, est pour l’instant perdu dans les étagères du label Blue, ce qui est une très mauvaise nouvelle pour la soul, qui comptait bien sur lui pour fournir à la fois Viagra, Prozac, mélatonine et antirides. La grande affaire de Steve Spacek, c’est cette écriture élastique et déliée, qui lui permet d’avaler en gourmet aussi bien le trip-hop que le R&B, le hip-hop que la drum’n’bass. Le grand Mos Def, autre rénovateur de la soul, ne s’y est pas trompé, offrant au trio anglais l’accueil sur son propre label Good Tree aux Etats-Unis.
Eve remixes (Blue/Barclay), le 13 novembre. Album à Pâques ou à la Trinité.
– KING Q4
Le disque de King Q4 est sorti en catimini, sur un label monté pour l’occasion, et enregistré dans un home-studio perdu quelque part dans les Yvelines. Derrière ce pseudo plutôt énigmatique se cache un jeune homme de 22 ans, dompteur halluciné des sons les plus abscons et amateur éclairé des musiques les plus intemporelles. Sur son disque, on retrouve des traces du Velvet Underground, de Steve Reich, King Tubby ou Merzbow. Sans oublier des bruits et cris épars recueillis chez Kurosawa ou Truffaut. Ce type-là, armé d’un sampler, s’évertue, tout seul, à récrire l’histoire des musiques qu’il aime, en faisant tourner ses machines comme des toupies ou des manèges enchantés. J. G.
King K4 (Clapping Music/Chronowax).
– RUBIN STEINER
Virtuose du collage sonore, le Tourangeau Rubin Steiner réussissait cette année avec son euphorisant deuxième album, Lo-fi nu jazz vol. 2, là où d’autres fantaisistes du sampleur et des platines l’Américain Deejay Punk-Roc en tête pèchent souvent par gourmandise : satisfaire ses propres appétits gloutons de collusions soniques en n’oubliant jamais qu’un mets n’est jamais aussi bon que lorsqu’il est partagé. Et que cette house hilare et hédoniste, dopée au swing fifties et drôlement portée sur le beat (le big-beat, le flat-beat, le breakbeat…), ne pourrait envisager de franchir l’épreuve du temps passé sur le dance-floor si elle n’avait toujours gardé à l’esprit cette maxime vieille comme l’e-monde : « These boucles are made for dancing. »
Lo-fi nu jazz vol. 2 (Platinium/Chronowax).
Vinyle 6 titres + un inédit en novembre.
Vinyle 6 remixes (Mr Quark, Olaf Hund, Lou & Placido, DJ Scissor, Wevie Stoner et, sous réserves, Grand Popo Football Club), en janvier 2001.
– LEMON JELLY
La grande rage, c’est qu’il faudra attendre désormais 2001 pour avouer son amour immodéré pour l’electro panoramique de ces Anglais. Comme chez Goldfrapp, c’est la BO qui a ici fait sa BA, en offrant à Fred et Nick des partitions de John Barry ou Michel Colombier pour Noël. Et comme chez Goldfrapp, ces grimoires vénérables ont été traités sans égards, servant de papier millimétré à de somptueux designs de chansons et à quelques scénarios soft-porno-psychédéliques.
Lemonjelly.ky (Impotent Furry/Delabel), en janvier.
– CHATEAU FLIGHT
Malgré son patronyme énigmatique, Château Flight constitue le duo le plus harmonieux de la rentrée. Les deux personnages qui le composent, DJ Gilb’r et I:Cube, possèdent pourtant leur lot de divergences. Le premier, ancien programmateur de Radio Nova, aime depuis longtemps sauter d’un genre à l’autre. Son envie de fraîcheur l’a ainsi poussé à délaisser une drum’n’bass jugée stérile, après avoir bravement essayé de l’importer. I:Cube, lui, a inventé, avec l’onirique Adore, une drogue douce des plus efficaces, une des moins coupées à la french touch. Il y a cinq ans, Gilb’r s’enthousiasmait sur les demos de I:Cube, poussant le sens de l’hospitalité jusqu’à fonder le label Versatile pour mieux le recevoir. Depuis, l’amitié aidant, l’idée d’une collaboration a fait son chemin pour se transformer en une rencontre musicale enrichissante et équilibrée. Les obsessions rythmiques du DJ, les ambiances du rêveur : le merveilleux album Puzzle rassemble avec aisance des pièces disparates, entre fusion organique et electronica farceuse.
Puzzle (Versatile/Pias).
– VLAD
« J’avais l’habitude de jouer sur ma console Nintendo en mettant le son très fort. C’est comme ça que j’ai découvert la musique électronique. » Si le Français Vlad n’était pas si jeune, on pourrait dater avec certitude cette rencontre au début des années 80 : c’est cette période qui hante son récent maxi Motion institute, première sortie sur le label référence Warp. Après avoir enregistré il y a quelques années un album de « metal synthétique », Vlad a depuis laissé tomber sa guitare. C’est donc logiquement que l’amateur de metal a adopté un sampler et que les riffs de hard-rock ont laissé la place à des bleeps inquiétants. V. B.
Motion institute (Warp/Source).
– MEKON
Il faut y revenir, oser l’écoute prolongée pour entrer dans le deuxième disque de Mekon, Relax with Mekon. Rapidement, vingt années de musique électronique se révèlent au fil des minutes pilotées par un des plus célèbres parias du genre : John Gosling. La préhistoire de la techno, il l’a appréhendée avec Psychic TV avec des boucles alors conçues sur bandes magnétiques, avant le sampler. Embarqué dans la déferlante house, il mixa rare groove et hip-hop dans les clubs de Londres, puis regoûta aux joies de la composition en fondant Bassomatic avec William Orbit. Avec Mekon, il revisite son histoire personnelle à travers un composé musical où s’enchevêtrent hip-hop, nostalgie new-wave, élégance lyrique, funk et big-beat. Une fusion cuménique piochant dans l’élite des âges, les voix invitées et les ingrédients sonores : Roxanne Chanté pour l’excellence hip-hop, Shawn Lee pour la grâce de la soul, les gadgets eighties des Rythmes Digitales ou encore le vieil ami Marc Almond pour le lyrisme malsain.
Relax with Mekon (Wall Of Sound/Labels).
– THE AVALANCHES
C’est sans doute parce qu’ils viennent à pied d’Australie qu’il faudra attendre la fin de l’hiver pour enfin entendre, en France, le groove fantasque et irrésistible des Avalanches, croisement entre les Beastie Boys et une espèce particulièrement espiègle de kangourous. DJ ahurissants et mélangeurs sans morale (Burt Bacharach s’y fait bastonner par A Tribe Called Quest), ils seront la meilleure raison d’attendre le printemps.
The Avalanches (XL/Delabel).
– ELECTRO CYPHER
Phénomène plutôt réjouissant et inattendu, le retour de l’electro a été l’un des meilleurs aspects du revival eighties qui a pollué la fin de ce siècle. Des Rythmes Digitales (pour le plus parodique) à Dopplereffekt (pour le plus radical), toute une génération de musiciens a redécouvert un genre qui, par un miracle de conservation, a gardé toute sa fraîcheur. Après DJ Medhi vampirisant le Planet rock d’Afrika Bambaataa (déjà à l’époque un pont entre le ghetto noir américain et l’expérimentation de Kraftwerk), Akhenaton et une dizaine d’agitateurs sudistes comme Freeman ou Bouga versent à leur tour l’obole aux anciens avec Electro Cypher. Exercice de style conforme aux originaux mais aux intentions sincères, cet album, parfois paresseux, est secoué par une réelle jubilation à remonter dans le temps sans se noyer dans la nostalgie. Surtout, signal fort envoyé d’une des places fortes du hip-hop français, ce projet prouve bien que les univers de la techno et du rap ont plus à gagner du métissage que du clanisme.
Electro Cypher (La Cosca/Labels).
– JAZZANOVA
Sous le pseudonyme un rien ronflant de Jazzanova se dissimule un trio allemand de remixeurs et DJ, qui prônent le mélange savant des musiques électroniques et du jazz. L’Allemagne, on s’en souvient aisément, a longtemps été une terre d’asile plus qu’accueillante pour les jazzeux déshérités, notamment lors des années 70, summum de la fusion jazz-rock. Jazzanova ne fait que continuer cette tradition-là, comme l’atteste l’anthologie The Remixes 1997-2000, méticuleux travail de déconstruction et de recomposition. Leur premier album, attendu pour le début 2001, devrait les voir asseoir leur pouvoir charismatique sur l’ensemble de la scène electro-jazz, de New York à Tokyo en passant par Berlin.
The Remixes 1997-2000 (Compost/M10).
– DAT POLITICS
Triturée à Lille sur des ordinateurs achetés au rabais, la musique de Dat Politics est une construction ludique, composée de fragments sonores qui s’entrechoquent et s’agrippent les uns aux autres, de bruits industriels transformés en chansons inespérées. Dans leurs disques, on retrouve, entremêlés, des fragments de pop et de rock (échappés de la formation parallèle Tone Rec), de hip-hop et d’électronique épileptique. Le tout a séduit une bonne partie de l’internationale electro, à commencer par le très sérieux label anglais Fat Cat, les Californiens rigolos de Tiger Beat, les Allemands A-Musik et les Japonais minimalistes de Digital Narcis : Dat Politics sera bientôt plus célèbre à l’étranger qu’en France. J. G.
www.ski-pp.com
– SEBASTIEN TELLIER
On triche, mais c’est par amour : les liens de Sébastien Tellier avec l’électronique sont ténus, à peine le temps de croiser du beau linge sur la compilation Source rocks. Mais son album L’Incroyable Vérité nargue tellement les gardiens de chapelles qu’il a finalement autant sa place dans ce numéro que dans une édition spéciale « Robert Wyatt et Randy Newman expliqués aux enfants », « Musiques ethniques de Paris » ou « Les BO sont-elles contagieuses ? ». Partout et nulle part à sa place : le signe des grands (enfants).
L’incroyable Vérité (Record Makers/Source). Vinyle en novembre, CD en février 2001.
– DANIEL WANG
Un jeune homme avide de musiques festives, de drag-queens iconoclastes et de machines musicales antiques. Rejeton de la club-culture de New York, il n’aime rien mieux que faire danser son public au son de tubes intemporels et d’hymnes orgiaques, où se croisent le funk spatial de Funkadelic et les orchestrations soignées et luxuriantes du Salsoul Orchestra. Après une dizaine de maxis, il sortira en janvier Idealism, son premier album de disco endiablée, débordante d’émotions et de ferveur, dont on ne se privera pas, sous peine de dépression profonde.
Idealism (Environ/Chronowax), en janvier 2001.
– SCHNEIDER
Par un effet de (ré)génération spontanée, l’Allemagne jouit actuellement de la scène musicale la plus riche au monde. Entre les accents latins des pensionnaires de Compost et la post-house de Losoul, Markus Nicolaï et d’Isolée, existe toute une fratrie d’artificiers de l’expérimentation. Burnt Friedmann, Pole ou Atom Heart (alias Señor Coconut) restent des personnalités à suivre à la trace, quand bien même la filature (pseudonymes, maisons de disques obscures) tiendrait de la gageure. Autre figure-clé, Schneider revient avec un mini-album à l’intensité maximale, contenant une incroyable reprise des Smiths.V. B.
Binokular (City Slang/Labels). Nouvel album cet hiver.
– OLAF HUND
« J’ai arrêté d’écrire au moment où j’ai eu un sampler. » Lorsque Olaf Hund a plongé la tête la première dans le bouillonnement de l’électronique il y a plus de cinq ans, la chanson a sans doute perdu un parolier fantasque et engagé. Mais la musique a hérité de plusieurs belles occasions de sourire à la vie, voire de rire aux éclats. « Mes premiers morceaux de techno sonnaient étranges. Puis j’ai décidé de m’amuser, d’adopter un état d’esprit différent. »
Ni house ni trip-hop ou techno : l’ uvre d’Olaf Hund décolle toutes les étiquettes qu’on lui appose. Ce qui explique la création de Musiques Hybrides, refuge rêvé pour ce maverick de l’électronique : un label à l’indépendance poussée, mais aux productions difficiles à dénicher.
Cette injustice va bientôt vivre ses derniers jours, puisque son Kitch kitch, remanié et « réajusté », bénéficiera, en janvier prochain, d’une sortie digne de ses mérites festifs et futés. On attendra également avec impatience le résultat de son alléchante collaboration avec le MC terrien le plus imprévisible, Gonzales.V. B.
Maxi : Goût cerise (Musiques Hybrides/Delabel), sortie début janvier.
Album : Kitch kitch (Musiques Hybrides/Delabel), sortie à la fin du même mois.
– CRISTIAN VOGEL
« Depuis le début de mon apparition sur la scène techno, je suis toujours resté le même marginal. Et j’aime ça. » Le parcours de Cristian Vogel, Anglais d’origine chilienne, présente un intéressant paradoxe : ce musicien reste attaché à un genre la techno dont il s’emploie de plus en plus à faire exploser lesfondements. Resctate 137 se complaît ainsi dans un funk tout cabossé et plein d’épines : malmené par les rythmes, un groove mutant naît, fascinant et dansant. Une approche biscornue du dance-floor déjà brillamment esquissée au sein de SuperCollider, le duo azimuté que Vogel forme avec Jamie Lidell. A moitié commencé, le deuxième album de SuperCollider s’annonce, selon Cristian, « plus deep que le précédent, gorgé d’émotions ». L’attente va être pénible.
Resctate 137 (Novamute/Labels).
– GEL
« Je compose de la pop », affirme Julien Loquet, désormais seul aux commandes de Gel, un ambitieux projet français d’electronica. Dans son panthéon de la pop, les Beatles ou les Beach Boys ont ainsi été remplacés par l’intégrale des terroristes d’Autechre ou du farceur Aphex Twin. « J’ai toujours bien aimé l’expérimentation, mais il me faut aussi des mélodies. » Sa prestation au festival Aquaplanning l’a prouvé : sa musique, complexe mais délicate, possède des vertus médicinales. Malgré des rythmiques en forme de craquements, ce sont de délicates touches d’harmonie et de vrais baumes au c’ur qui crèvent l’écran de son ordinateur.
Evidenz (Goom/Chronowax).
– BOARDS OF CANADA
Un beau mystère, à la légende singulière. Derrière ce nom se dissimule en fait un duo écossais de petits-maîtres en électroniquerie mélodique, auteur d’un album hautement influent, Music has the right to children, partie visible d’une discographie monumentale. Sur un nouveau maxi, la musique rêveuse des Boards Of Canada se fait moins urbaine, nettement plus ensoleillée et bucolique. On attend avec impatience l’album, prévu pour février 2001.
In a beautiful place out in the country (Warp/Source), en automne.
– MR. NEVEUX
Avec la sortie remarquée de l’album de Ben’s Symphonic Orchestra, l’année de Microbe le label français qui deviendra grand a déjà été bien remplie. Manquait cependant à l’appel le chef de file de la maison, Mr. Neveux. Le mal sera réparé in extremis mais de superbe manière avec la sortie prochaine du maxi anticonformiste Monkey racing. Plus proche du psyché rock que de la house glauque, ce disque scelle en outre la formation d’une famille d’iconoclastes puisque Olaf Hund et Rubin Steiner, en remixers rigolards, y figurent également. En 2001, Mr. Neveux sera doublement présent puisqu’il a composé la BO du prochain film de Patrice Chéreau, Intimacy, et qu’il lèvera enfin le voile sur son deuxième album. V. B.
Monkey racing (Microbe/Discograph), sortie, uniquement en vinyle, début novembre.
Second album, sortie mars 2001.
– KINOBE
« Mis à part le heavy-metal, nous apprécions toutes les musiques. En conséquence, nous ne nous imposons aucune restriction. » A l’heure où l’éclectisme et l’ouverture d’esprit servent de normes, le langage tenu par Julius Waters et Mark Blackburn sonne banalement contemporain. Vu le premier album fourre-tout de Kinobe, leur entité à vue large, ces deux Anglais se révèlent pourtant sincères, aussi à l’aise avec les petits maîtres de la pop Ben & Jason qu’avec un rappeur à voix rauque. « Nous ne nous voyons pas comme un groupe de musique électronique, mais plutôt comme des gens qui utilisent les machines ou les instruments acoustiques selon leurs besoins, les exigences de leurs morceaux. » Baptisé Soundphiles, le premier et luxuriant album de ces songwriters modernes souligne une attirance pour les ambiances cinématographiques. V. B.
Soundphiles (Zomba).
– SPORTO KANTES
Quelque deux ans et demi après ses premiers balbutiements discographiques, Sporto Kantes, l’une des toutes premières signatures du gourmet label Catalogue, s’apprête à publier son premier album, le formidable Act one. Disque d’abstract soul ébouriffant de sensualité et de maîtrise, qui devrait rendre Moby fou de jalousie et faire école dans une scène où le temps semble s’être figé début 1978 sur le parquet d’une discothèque new-yorkaise. Car si de disco il n’est jamais question ici, Sporto Kantes n’en connaît pas moins son histoire du groove sur le bout des pieds, lui préférant simplement d’autres idiomes (le blues, le rhythm’n’blues, la soul, les BO de films, le reggae, le dub ou le hip-hop), dont la manipulation ne supporte plus la médiocrité. F. V.
Act one (Catalogue/Wagram), sortie en janvier 2001.
{"type":"Banniere-Basse"}