Depuis que les DJ’s-compositeurs ont investi le pré carré des “musiciens” et redéfini le rôle du producteur, un malentendu croissant s’est fait jour : les DJ’s enthousiasmants sur disque ne sont pas toujours des héros sur scène et inversement. DJ Cam a contourné intelligemment le problème : il ne joue jamais sa propre musique […]
Depuis que les DJ’s-compositeurs ont investi le pré carré des « musiciens » et redéfini le rôle du producteur, un malentendu croissant s’est fait jour : les DJ’s enthousiasmants sur disque ne sont pas toujours des héros sur scène et inversement. DJ Cam a contourné intelligemment le problème : il ne joue jamais sa propre musique en live. « Je l’ai fait deux fois et je ne recommencerai plus jamais », avoue-t-il en s’en mordant toujours les doigts. Quitte à dérouter, il présente sur scène une facette assez éloignée de la sophistication qui a fait sa réputation, avec une sélection brute enracinée hip-hop Côte Est il n’est pas rare de le voir enchaîner KRS One avec Public Enemy, Poor Righteous Teachers, Cypress Hill et Gangstarr. Faute de pouvoir s’offrir une playlist aussi prestigieuse sur ce huitième volume de la série DJ Kicks après des mixes signés ces derniers mois Nicolette, Kruder & Dorfmeister ou Carl Craig , DJ Cam a choisi de présenter quelques excellents rappers méconnus, à majorité britannique Rasco, Tek 9, Rodney P, Grand , deux freestyles inédits de Jeru The Damaja et Channel Live (sous le nom d’Awesome Two) et une bombe signée Ragga Twins, un de ses groupes favoris et auteur d’un toujours inégalé Hooligan 69. « J’ai voulu un DJ Kicks très brut, à l’inverse des exercices hyperléchés des volumes précédents, tout en exposant des rappers anglais injustement éclipsés par la grosse production américaine », explique-t-il. Mixé en temps réel, ce disque reflète bien ces sets live, quoique « légèrement moins agressif ». L’album démarre effectivement en apesanteur, avec son chef-d’oeuvre Dieu reconnaîtra les siens bijou usé jusqu’à la corde sur des dizaines de compilations , et se clôt en douceur sur un inédit de l’auteur particulièrement indolent. Entre-temps, une lente montée jazz-funk instrumentale avec les élégants Minus 8, Daphreephunkateers Sci-fi et Mighty Bop, ponctués comme il se doit de nombreuses citations camesques, sert d’introduction à une tranche de hip-hop lumineuse à tendance A Tribe Called Quest/Hieroglyphics. Manière pour Cam de rendre un hommage appuyé à cette frange de l’underground qui a encore la dignité ne pas faire opportunément ses emplettes chez Sting ou Roberta Flack.
Laure Narlian
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