Sans nouvelle discographie de MGMT depuis 2019, le duo américain crée la surprise en sortant un ancien live en forme de nouvel album fascinant.
C’est à une drôle de surprise que nous convient Benjamin Goldwasser et Andrew VanWyngarden en balançant sans crier gare 11.11.11, un nouvel album live, alors qu’on était sans nouvelles d’eux depuis l’excellent single In the Afternoon en décembre 2019, première référence de MGMT Records. L’année précédente, MGMT sortait Little Dark Age (2018), un sommet d’electropop sombre et naïve, de tubes sur le fil du rasoir kitch, et de confessions psychédéliques, qui marquait la fin du contrat de ces deux esprits trop libres et barrés avec Columbia et la création de leur propre label.
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Flashback. Le 11 novembre 2011, à l’occasion d’un gala destiné à récolter des fonds pour la lutte contre le Sida, MGMT se retrouvait à jouer en direct du Guggenheim Museum de New York, une bande-son spécialement composée à l’occasion d‘All. L’immense exposition proposait une rétrospective de l’artiste iconoclaste Maurizio Cattelan, qui, pour célébrer ses adieux avec l’art contemporain, avait suspendu quelque 130 pièces emblématiques de sa carrière dans la nef centrale du musée. “Nous avons créé une expérience musicale qui s’adapte autant à l’architecture du bâtiment qu’à l’exposition elle-même, déclarait à l’époque le groupe, c’est une exposition tellement surprenante qu’elle mérite une musique totalement originale !“
Une plongée sonique et lumineuse sans pareille, au milieu de VIP, de top-modèles et de marchands d’art hallucinés, sur lesquels les onze morceaux composés spécialement par MGMT ricochaient, en même temps qu’une bataille de lasers de couleur verte, jaune et rose, jouaient à Star Wars sur les œuvres suspendues de Cattelan. Un concert hors du commun (et le premier au Guggenheim) que certains décrivaient comme une expérience totalement angoissante, voire, comme un voyage sous acide. Un bad trip que le New York Times résumait ainsi à l’époque : “Parfois, la musique ressemble à celle de Laurie Anderson, et d’autres à un jam de musique caribéenne. Une foule jeune et propre sur elle se tenait hypnotisée, tandis qu’un kaléidoscope de lumières digne de Las Vegas faisait scintiller toute la rotonde.“
Replonger avant de sauter
Alors que les rumeurs – enfin – d’un cinquième album se font de plus en plus insistantes, Andrew VanWyngarden ayant, semble-t-il, élu domicile à Paris (on l’a vu mixer récemment à la soirée de lancement de l’exposition sur les années 1980 au musée des Arts Décoratifs), MGMT a ressorti les vieilles bandes de l’enregistrement de ce live pas comme les autres, dont on trouvait de rares extraits au son défaillant sur YouTube, les a retravaillées avec Dave Fridmann (producteur historique de Mercury Rev ou The Flaming Lips), et sort enfin le tout sous la forme d’un vinyle coloré en édition limitée. Tout au long des onze titres, pas loin de l’univers foisonnant de leur troisième album MGMT (2013), on passe avec délectation de plages psychédéliques à de l’ambient contrariée, d’incantations façon Dead Can Dance à des soli de tablas indiennes, de ballades folk perverties à de purs moments de béatitude pop. Sur 11.11.11, MGMT déploie son univers foutraque et fascinant nourri de LSD et de cold wave, de rock et de mélancolie, d’electro et de folie douce, et nous gratifie, l’air de rien, avec sa décontraction habituelle, d’un des meilleurs disques de sa carrière.
11.11.11 (MGMT Records). Sorti depuis le 15 novembre.
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