Du 18 au 21 juillet dernier le
Festival International de Benicassim a encore tenu le pari d’offrir une
programmation délirante sous le soleil espagnol. Entre brumisateur et sueur
nous avons pu assister à des concerts exceptionnels, entouré d’une population
majoritairement anglaise, venu boire de la cerveza au litre.
18 JUILLET
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Iggy Pop and The Stooges ouvrent le bal sous les yeux ébahis de fans de tous âges, venu goûter, le temps d’une heure, à la douce saveur d’un temps passé. Iggy n’a en rien perdu sa force scénique, nous le retrouvons en imposant prédateur éructant I Wanna Be Your Dog tout en se traînant par terre. Un peu caricatural, un brin trop poli, le concert nous rappelle à l’ordre : les années 70 sont belles et bien derrière nous. C’est au tour de Bright Eyes de s’emparer de la grande scène, accompagné de sa tripotée de musiciens tous de blanc vêtus. Les violons s’envolent tandis que la batterie et les percussions font office de chef d’orchestre. C’est le sourire jusqu’aux oreilles que l’on accueille le charismatique Conor Oberst qui, avec ses chansons belles à pleurer, électrise un public conquis. Pour finir la nuit, deux équipes de filles, People are Germs et les Trash Pussies vont faire office de pousse disques. Malheureusement elles ne me tiendront en haleine qu’une petite demi-heure, la pauvreté de leur sélection alliée à leur incapacité à enchaîner deux morceaux correctement m’envoie au lit plus rapidement que prévu. Il vaut mieux garder des forces pour le marathon de concerts qui va sévir durant les trois prochains jours.
20 juillet
Antony and the Jonhsons arrivent sur la scene Fiberfib en fin d’après-midi, dans un halo de soleil et de douceur. L’endroit n’est évidemment pas adéquat pour Antony, il fait chaud, il y a du bruit et il est difficile de se concentrer. Malgré sa gêne évidente, il arrive à tourner ces contraintes en sa faveur et livre un show sans artifice plus hippie que drama queen. Le concert est court, joli et frais et c’est lorsque il reprend Crazy In Love de Beyonce que le public tombe définitivement sous le charme de ce nouvel Antony, décomplexé, souriant et humain. Dans un tout autre registre, les Klaxons ont – une fois de plus – donné le meilleur d’eux même et ravi les kids des premiers rang comme les puristes du rock les plus grognons qui ont finit par avouer que quand même « les Klaxons sur scène, ça en jette ». (Une pensée amicale à Jamie Reynolds qui s est cassé la jambe la semaine dernière lors d’un concert à Angoulême). Les quinquagénaires de Devo, dans leurs costumes de scène habituelle (combinaisons jaunes et chapeaux-tube sur la tête), ont ensuite prouvé au monde que l’ont pouvait être ringard, ridicule et trop cool en même temps. Les tubes Mongoloid, Wip It et Girl You Want n’ont pas pris une ride. C’est incroyable.
21 juillet
Pour commencer ce troisième jour de festival, une écoute sérieuse et disciplinée de Camera Obscura me semble de bonne augure. Le groupe assure un show en l’absence de son trompettiste, donnant une tonalité beaucoup plus intimiste a l’ensemble du concert. La chanteuse, Tracyanne Campbell, essaye en vain de faire imiter le bruit de la trompette au public qui, perdu, (ça fait comment déjà une trompette ?) reste des plus silencieux. Camera Obscura ne fera pas de promo ce soir et se contentera de ravir, de manière simple et efficace, ses fans de la première heure. Nous enchaînons avec un petit tour retro du coté de la bande des B-52’s. Mais contrairement à Devo la veille, le groupe s’essouffle vite, leurs morceaux manquent d’âme et de chaleur. Pris d’un profond ennui, je rejoins la scène Fiberbib sur laquelle se produisent un autre groupe estampillé 80’s : Human League. Sans grande surprise mais avec entrain, on se laisse vite gagner par le karaoké géant sur Don’t You Want Me Baby ?, on rigole avec son voisin, s’emplissant de toute cette énergie positive avant d’aller se défouler sur les tubes du caricatural Fisherspooner. Effectivement c’est drôle et d’un goût des plus douteux. Le chanteur est en slip, entouré de danseuses contemporaines qui s’activent dans tous les sens. C’est Véronique et Davina en mode ecstasy et LSD. Et franchement, à cette heure avancée, on ne demande pas mieux.
22 juillet
C’est sans attentes particulières et à court d’énergie que je commence ce quatrième et dernier jour de Benicassim. Je suis loin de me douter que je vais y voir les concerts clés du festival, des perles d’intensité et de grandeur. On débute avec la très attendue Amy Winehouse, qui livre l’un show les plus poignant du festival. Amy materne ses sept musiciens et ses deux choristes, comme dans une grande famille jazz. Un peu nerveuse sur les premiers morceaux (extraits du dernier album), elle semble beaucoup plus à l’aise avec ses anciens titres, plus rocksteady, sur lesquels les musiciens s’autorisent quelques freestyle. Amy Winehouse termine son show avec son tube Rehab, en ayant rendu toutes les filles jalouses de sa désinvolture. Ce petit bout de femme danse sur scène comme si elle était seule dans sa chambre, ajuste sa choucroute, remonte son minishort, esquisse un sourire et se casse. On se presse ensuite sur la scène Vodafone afin d’admirer notre chouchou Patrick Wolf. Rien ne sert de courir, le changement de scène est extrêmement long. Et ce n’est que le début des problèmes auquel le joli rouquin et son équipe vont devoir faire face. Le son est mauvais, on le sent nerveux, il fait des doigts (en haut, en bas) pour régler les retours, la voix, les instruments, en vain. Au premier morceau, il sait déjà qu’il ne pourra pas faire état de sa virtuosité et oriente son concert vers la performance. Il se met a moitié nu, se jette par terre, saute partout pour ensuite se recoucher langoureusement en se caressant le corps. Le public est ravi et moi aussi, ce fut l’un des concerts les plus excitant du genre. S’enchaîne à cela un concert musclé de The Go! Team. Le show ira à cent à l’heure et fera découvrir a un public hystérique, les morceaux de leur nouvel album Proof of Youth. Ninja joue avec le public avec l’aisance d’une animatrice du Club Med (il y a une choré et un refrain a reprendre pour chaque morceau), le public joue le jeu et la suit jusqu’à Ladyflash ( le plus beau pogo du festival) où elle termine par une démonstration de danses du monde, New York, Bamako, Bombay, Dublin… finissant par hurler « Benicassim ! ». La foule saute plus haut que jamais, c’est là que ça se passe, c’est grand. On resterait bien encore quelques jours à glander sur la plage pour se remettre de nos émotions et faire les touristes mais comme chaque bonne chose à une fin, je quitte à regret ce grand festival qui, sous des airs d’industrie musicale, fut bien plus intime et chaleureux que prévu.
– site officiel : www.fiberfib.com
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