Le Londonien haut en vertiges revient avec un classique de soul ambient. Critique et écoute.
Ils sont désormais nombreux à surfer la vague de la nouvelle soul, mouvement post-James Blake que ce dernier continue de dominer depuis 2011. Mais rares sont ceux ayant trouvé une singularité assez forte pour s’imposer dans la tendance, développer un style plutôt qu’encourager une mode, tenter justement de se défaire de la filiation. Daniel Woolhouse, alias Deptford Goth, est de ceux-là depuis sa découverte il y a deux ans, et son retour est la nouvelle preuve d’un pari gagné pour cette génération de rêveurs au ralenti – on s’entend : pas des mollassons, plutôt des chasseurs de vertiges.
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Sobrement titré Songs, ce deuxième album est exactement ce qu’il promet d’être : une ascèse, un dépouillement, un abandon des fioritures d’un genre déjà récupéré par les postures arty et les divas pop. Ici, l’électronique est taillée au laser autour de mélodies d’une délicatesse à rendre fou, que Woolhouse porte en assumant enfin sa voix religieuse, fantomatique – sur Life After Defo, son premier album, elle se diluait davantage à l’ambient music autour. Mais pas de délavage pour autant : contrairement à beaucoup d’albums reçus, chaque morceau de Songs développe ses propres idées, trouve une identité en soi, se lie aux autres par la couleur nacrée de l’ensemble.
A travers quelques notes éparses, une ligne de synthé qui plane ou une poignée de mots gris pastel, ce nouvel album fait imploser ce qu’on croyait savoir de son auteur, et place celui-ci dans un paysage en mouvement : la pure contemporanéité, temps fuyant et abstrait où seuls comptent l’avenir et ses possibles débouchés. Dans ce brouillard splendide, c’est la réalité toute entière qui s’estompe dès la première écoute. On rêve alors d’un monde où un tube ressemblerait à Relics, The Lovers ou We Symbolise, et dans lequel Brian Eno serait le gourou d’un nouveau genre humain, débarrassé des passions et des tracas du temps. A chaque instant, son intendant Deptford Goth mettrait la vie sur “pause”.
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