[Philippe Cerboneschi alias “Zdar” nous a quittés mercredi 19 juin en soirée. On l’a connu comme un producteur de talent, mais surtout comme la moitié de Cassius, un des grands noms de la French Touch. En mémoire de l’artiste, nous vous proposons de (re)découvrir notre rencontre avec lui en 2011.]
Producteur du dernier Phoenix, membre du duo Cassius et ami de Daho, Philippe Zdar est l’homme du moment. Rencontre dans son studio parisien.
A la fin des années 80, Zdar quitte Marcadet pour un autre studio, Plus Trente. Il y suit Dominique Blanc- Francard qui lui présente son fils, Hubert, dit Boombass. “Mon père m’avait dit : ‘Tu vas aimer ce type, il est dingue.’ On est devenus potes en quatre minutes”, raconte Boombass. Ils bidouillent un peu ensemble mais collaborent vraiment sur la musique de Bouge de là de MC Solaar. “C’est en travaillant sur ce titre qu’on s’est rendu compte qu’on avait quelque chose à faire ensemble”, explique Zdar.
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Boombass, qui compose sous le nom de La Funk Mob, demande à Zdar de l’épauler. La carrière de Solaar décolle : il est choisi par le rappeur américain Guru pour figurer sur la compilation Jazzmatazz. “Le soir où on a appris ça, j’ai compris que ça commençait pour moi”, plaisante-t-il. En Angleterre, un jeune type nommé James Lavelle tombe sur les instrus de Solaar, parfois signés Zdar et Boombass. Il propose à la doublette de rejoindre son jeune label ultrabranché, Mo’Wax, dont les pochettes sont dessinées par le graffeur Futura 2000. “On nous demandait des morceaux trip-hop longs et un peu planants. Philippe était superdoué pour ralentir les choses tout en leur donnant une structure.”
Le duo devient La Funk Mob, pétarade dans la hype, mais Zdar “trouve le trip-hop un peu chiant”. Il découvre les raves en compagnie d’Etienne de Crécy, avec qui il partage un appartement. Il est fasciné par la house. Avec de Crécy, sur un sampler prêté par Boombass, il compose en 1992 Pansoul, modèle de groove acide et rentré, qui sortira en 1996. “Etienne bossait le jour et moi la nuit, on se laissait des bouts de musique sur un ordi, c’est devenu Motorbass.” Zdar enchaîne tout de suite sur Cassius, avec Boombass, en 1996. “On a commencé à mixer dans tous les sens, on adorait ça.” Boombass : “Je me souviens d’une tournée avec Cassius et Daft Punk en Angleterre. On trimbalait des tonnes de matos mais on s’amusait t ellement ! C’était les débuts de la French Touch.” Cassius publie trois albums – 1999, Au Rêve et 15 Again – et devient un groupe culte de l’electro française.
Fin 2010, le duo a signé son grand retour en sortant l’ep The Rawkers sur le label Ed Banger de Pedro Winter. Entre-temps, Zdar est devenu un producteur très demandé. Un peu grâce à Phoenix qui en 2008 vient poser ses valises au studio Motorbass. “On avait commencé à enregistrer sur une péniche et ça se passait mal pour des problèmes de mal de mer, plaisante Branco de Phoenix. Philippe nous a proposé de venir chez lui.”
En janvier 2009, Zdar débarque au studio et explique à Phoenix qu’il faut que leur disque soit prêt en juin : “Je leur ai raconté mon aventure des années 80 sur les quais de Seine, je leur ai dit que leur disque devait sentir ce moment-là.” Les quatre Phoenix pigent tout de suite et avec son aide donnent cette belle lumière à Wolfgang Amadeus Phoenix. Branco : “Il a un côté général avant la bataille. C’est une force de la nature, avec en même temps une vision ultrasensible des choses. Il a toujours une analyse pertinente. C’est un génie de la production et un mec hypercultivé : avec lui, tu peux parler aussi bien d’Antonioni que de la meilleure tomate.”
Aujourd’hui, Phoenix cartonne aux Etats-Unis et tout le monde veut bosser avec Zdar. Les Beastie Boys l’ont invité à redynamiser leur nouvel album à New York. Le studio Motorbass ne désemplit plus : les excellents Housse De Racket et l’espoir de la chanson française Jérôme Van Den Hole y sont passés. “Je suis obligé de refuser du monde, c’est important de savoir faire des choix”, explique le patron. Un jeune type nommé Bastien déboule dans le studio alors que la rencontre touche à sa fin : c’est le nouveau stagiaire. Zdar : “Il a frappé à la porte il y a quelques mois parce qu’il avait lu que Two Door Cinema Club enregistrait là. Il m’a demandé s’il pouvait rencontrer Philippe Zdar. J’ai discuté une dizaine de minutes avec lui et je lui ai dit que, ouais, il allait pouvoir le rencontrer.”
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