D’une voix patinée portée par une pop sophistiquée, le dandy anglais se livre entre douleur et désinvolture.
Depuis ses premiers pas au début des années 2000, Baxter Dury a réussi à se faire un prénom dans la pop anglaise. A l’âge de cinq ans, le fils de Ian Dury posait fièrement sur la pochette de New Boots and Panties!!, le premier album de son père. Quarante ans plus tard, il s’est construit sa propre discographie, mince mais inspirée, dont It’s a Pleasure (2014), son album précédent, fut l’un des grands moments.
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Après une tournée qui s’est étirée jusqu’en 2015, Baxter Dury a eu envie de changer d’air :
“Je me suis installé à la campagne. Je me suis mis à composer de nouvelles chansons très vite. J’ai commencé à écrire un livre que je n’ai jamais fini – un récit de fiction sur ma vie, un truc totalement prétentieux que j’aime bien ! Cet emménagement, je pensais que ça serait sympa. Ça l’a été pendant environ quatre mois. Et puis, il y a eu le Brexit. Des zombies racistes sans aucune empathie sont sortis de nulle part, alors je suis rentré à Londres.”
Un album inspiré d’une rupture amoureuse
Même malade et exténué par une insomnie, Baxter Dury charme avec ses anecdotes pleines d’autodérision et d’humour noir. Ce même sortilège, entre ironie mordante et spleen sensible, plane sur sa musique. Avec quelques ingrédients essentiels (sa voix patinée qui s’exprime en spoken word, des chœurs féminins, des cordes ouvragées), on obtient des chansons pop sous haute influence Gainsbourg, ce qui pourrait expliquer son succès en France.
Pour Prince of Tears, son nouvel album, le chanteur désenchanté s’est inspiré d’une rupture amoureuse. “J’aime bien ce titre pour la tristesse solennelle, voire présidentielle, qu’il dégage. Ça parle avec franchise de ce qui arrive quand on se sent brisé. Une sorte de désespoir qu’on retrouve aussi sur la photo de la pochette. J’utilise parfois des personnages de fiction.” Le plus mémorable d’entre eux fait irruption dès le premier morceau, l’entêtant Miami qui frappe fort dès les premières secondes. Le dandy anglais se change alors en ordure tape-à-l’œil qui se croit tout permis – il avoue qu’interpréter ce texte vachard est un exercice particulièrement jubilatoire en concert.
Moins bricolées que par le passé, plus ambitieuses dans leurs instrumentations (claviers et cordes à foison), ces dix nouvelles chansons accueillent des invités qui donnent la réplique au songwriter et à sa voix un brin monocorde. L’ex-Pipettes Rose Elinor Dougall (sur le touchant Porcelain) et la chanteuse Madeleine Hart (sur plusieurs morceaux) déroulent leurs timbres aériens, tandis que Jason Williamson du duo Sleaford Mods s’illustre sur le nonchalant Almond Milk.
Difficile de savoir quelle est la part de légèreté et celle de douleur dans ce jeu permanent : ici, l’autodérision et la désinvolture dissimulent avec élégance les dommages internes de ce prince aux larmes de destruction massive.
En concert le 1er décembre à Paris au Trianon.
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