Escapade familiale et douce du bassiste de Louise Attaque, à califourchon entre pop anglaise et folk américain.
Etre musicien de Louise Attaque peut être un bon métier, offrant beaucoup de temps libre, entre deux tournées, quelques enregistrements aussi complexes à organiser qu’une réunion entre Palestiniens et Israéliens – et de nombreux et homériques brainstormings où les “storms” ressemblent à des ouragans.
Bref, on se prend beaucoup la tête, parfois le pied, dans ce groupe au QI trop élevé pour accepter les petits arrangements sinistres entre amis et les compromissions real-politiciennes qui maintiennent en survie artificielle tant de groupes exsangues. Le problème des membres de Louise Attaque, c’est qu’ils semblent incapables de vivre confortablement de leur pactole, craignant le désœuvrement comme un danger mortel, culpabilisant chaque seconde de farniente et le combattant avec une vigueur stupéfiante. Louise Attaque ne rend pas riches les agences de voyage vers les plages vierges.
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Pendant que Gaétan Roussel travaille en profondeur avec Bashung, le bassiste/graphiste Robin Feix et sa douce Anne Berthe gambadent aujourd’hui sur Poney Express, l’occasion de renouer avec une écriture légère, sautillante et instinctive qui ressemble sans doute plus aux disques ramenés et adorés à la maison qu’à ceux confectionnés au bureau Louise Attaque.
Un vrai disque hobby, donc, qui sent bon le bois tendre et la colle à maquettes, sous influence (il en parlent eux-mêmes dans une chanson) de Belle & Sebastian ou plutôt, de l’album solo que leur chanteuse Isobel Campbell a enregistré il y a deux ans avec Mark Lanegan, cow-boy bourru et amoché.
Car c’est ce joli et insouciant grand écart entre une pop anglaise carillonnante et un folk américain nettement plus ombrageux que réalise le duo, équipé pour un tel voyage de banjos comme de synthés antiques, d’austère acoustique comme de cordes élégiaques.
En Angleterre justement, où de tels formats idéaux existent, Daisy Express serait sans doute sorti sous la forme d’un mini-album, recentré autour des chansons indiscutables (le magnifique Les Femmes de Milwaukee ou l’euphorique single Paris de loin) de ce disque aux enjeux strictement intimes. Du coup, quelques longueurs, des redites et baisses de tension parasitent un peu le récit, étiolent cette pop-folk qui se souvient avec émotion de ces sixties effrontées où Nico chantait du Jackson Browne lovée dans les violons, où Nancy Sinatra habitait d’étranges spaghetti-western taillés sur mesure par Lee Hazlewood. “Dans mes rêves, je suis une femme de Milwaukee”. Même si de Milwaukee, trop sensible et délicate pour être une violente femme.
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